Kada Freoua, un Messahrati depuis plus de 50 ans

Ramadhan à Timimoun

Les habitants de la région de Timimoun renouent en ce mois de Ramadhan avec les appels du Messahrati Kada Freoua qui a pris, pendant plus de 50 ans, la relève des anciens pour perpétuer un rite populaire ancestral jalousement gardé. Faisant partie des traditions de Ramadhan préservées d’une génération à une autre, le Messharati ou «Tessekihet» en variante amazighe zénète, a pour mission, en tant que bénévole, de réveiller les habitants de Timimoun pour le S’hour (repas d’avant la reprise du jeûne) en usant de son tambourin et de sa voix, les tirant d’un sommeil profond. Kada Freoua, un sexagénaire ayant assumé cette valeureuse mission, se munit, peu après minuit, de son tambourin, parcourant à pied les rues et ruelles de la ville de Timimoun sur un kilomètre et demi (1,5 km) et extirpant les habitants de leur profond sommeil pour les inviter à se revigorer en prenant un bon repas du s’hour pour pouvoir affronter aisément une journée de labeur et de jeûne. Cheikh Kada, comme aiment à l’appeler les gens de la région, a expliqué que le Messahrati amorce son parcours par des louanges à Allah et par la prière et la paix sur son prophète (QSSSL), avant de lancer ses refrains cultuels appelant d’emblée au réveil pour clôturer ce tour d’implorations à Dieu et pour les personnalités vénérées, dont Sidi Abdelkader Djilani et Cheikh Moulay Tihami. Outre les fortes sonorités produites par les coups de baguette sur son tambourin, les louanges répétitives utilisées, durant la seconde quinzaine du mois de Ramadhan, sont plus soutenues et ponctuées de vers poétiques chantant les préceptes de l’Islam. Des habitants de Timimoun témoignent que les anciens Messahrati, en l’occurrence Hadj Bahmid Djedid et Hamou Lebgâa, sillonnaient, munis de leurs tambourins, les rues et ruelles appelant, d’un timbre vocal rauque, les habitants à tirer profit du repas du S’hour. Approché par l’APS, de nombreux citoyens ont expliqué que la mission du Messahrati ne consistait pas uniquement à réveiller les habitants en résonant son instrument pour signifier l’heure du rite du S’hour, mais aussi pour égayer leur vie de chants, d’implorations religieuses et préserver ce legs ancestral. Cheikh Kada s’emploie, des nuits avant la clôture du mois de Ramadhan, à user d’autres locutions exprimant la fin proche du mois sacré pour recevoir également, à l’aube, des dons et cadeaux de la part des habitants, scellant ainsi le respect que lui voue la population en récompense aux efforts fournis aux habitants de la région.n