Le premier chahid guillotiné, Ahmed Zabana, inspire toujours les jeunes générations

Mascara

Le sacrifice et la bravoure du chahid Ahmed Zabana, guillotiné le 19 juin 1956, à la prison de Sarkadji (Alger), demeurent soixante-sept ans après cet effroyable événement, une source de fierté et un exemple de courage dans la mémoire collective, transmise de génération en génération. «Le martyr Zabana représente un exemple d’héroïsme et de sacrifice. Face à la guillotine, utilisée pour la première fois par l’appareil répressif colonial, il a fait preuve d’un courage sans faille, armé d’une forte croyance en la juste cause de son pays», a souligné à l’APS le Dr Hamaïdi Bachir, professeur d’Histoire de l’Algérie moderne et contemporaine à l’Université «Mustapha Stambouli» de Mascara. Ahmed Zahana dit Ahmed Zabana, connu sous le nom de Si Hmida, est né en 1926 au village de Djenine Meskine, dans de la commune de Zahana (Mascara), au sein d’une famille, composée de huit enfants. Il étudia au sein d’une école coranique de la région avant de rejoindre l’école primaire pour obtenir sa sixième. Lors du déclenchement de la 2e Guerre mondiale, il intégrera les rangs des Scouts musulmans algériens et fréquentera Madrasset El Falah d’Oran, relevant de l’Association des oulémas musulmans algériens. Il suivra des cours de soudure dans un centre de formation professionnelle pour décrocher son diplôme dans cette spécialité. Ce qui lui permettra d’obtenir un poste d’emploi au sein de ce centre de formation, puis à la cimenterie de la commune de Zahana. A partir de 1941, il adhère au mouvement national pour contribuer à la vulgarisation des idées et des principes défendus par les leaders politiques et contribuer à la sensibilisation des jeunes des quartiers populaires, rappelle le même universitaire. En 1947, l’Organisation secrète (OS) l’a chargé de former ses cellules dans les zones qu’il surveillait, et qu’il participe à l’attaque historique de la poste d’Oran, le 5 avril 1949. Pour ses activités politiques, les autorités coloniales françaises l’arrêteront en 1951 et le condamneront à trois ans de prison et à trois autres années de non résidence à Oran. Après la découverte en 1950 des activités de l’OS et son démantèlement par l’administration coloniale, Ahmed Zabana se refugia à Kristel (Oran), Mostaganem, Mascara et dans sa ville natale, où il renoua avec les dirigeants du mouvement national et commença à former un groupe de jeunes pour les préparer au combat libérateur.

Un militant aguerri
En 1953, il reprit ses contacts, notamment avec Larbi Ben M’hidi, présent dans la wilaya de Sidi Bel Abbès, Benabdelmalek Ramadan à Mostaganem et Abdelhafidh Boussouf, se trouvant alors à l’ouest du pays. Au printemps de l’année suivante, un groupe de jeunes militants est déjà constitué, coïncidant avec la création du Comité révolutionnaire de l’unité et l’action (CRUA) et le lancement des collectes d’armes, d’équipements et de vêtements. Selon le témoignage du moudjahid Stambouli, compagnon du chahid, Ahmed Zabana se déplaça dans plusieurs régions, comme Aïn Franine (Oran), Tessala (Sidi Bel Abbès) pour rencontrer des militants pour préparer le déclenchement de la révolution armée. C’est dans la grotte de Boudjlida, se trouvant dans la commune d’El Qâada (Mascara), qu’une réunion spéciale s’est tenue sous la supervision des défunts Benabdelmalek Ramdane et Ahmed Zabana, en présence de 13 moudjahidine. Ces derniers ont été informés de la création du FLN et de son bras armé l’ALN. Le 4 novembre 1954, Ahmed Zabana mena la plus importante opération militaire au niveau de la forêt «Moulay Smaïl», dans la commune d’Oggaz. Il se réfugia avec un groupe de moudjahidine dans la grotte de Boudjlida, qui sera vite encerclée par l’armée française. Une bataille disproportionnée a été engagée le 8 novembre 1954. Ahmed Zabana et ses compagnons, pour la plupart blessés, sont arrêtés. Des documents en possession de la Direction des Moudjahidine et des ayants droit indiquent qu’après l’arrestation d’Ahmed Zabana, lors de cette bataille au cours de laquelle Brahimi Abdelkader tomba au champ d’honneur, les forces d’occupation françaises l’ont transféré à l’hôpital militaire d’Oran pour y être soigné. Il sera ensuite emprisonné avant d’être renvoyé devant le tribunal militaire, le 21 avril 1955, qui le condamnera à la peine de mort. Une fois condamné, il sera transféré à la prison Barbarousse, près de La Casbah d’Alger, pour être de nouveau présenté au tribunal pour confirmer le précédent jugement rendu par le tribunal d’Oran. Il sera exécuté par guillotine, à l’aube du 19 juin 1956, au sein de cette prison. Le 19 juin de chaque année, la wilaya de Mascara, comme les autres régions du pays, commémore le martyr héros Ahmed Zabana, pour évoquer ses sacrifices et sa lutte pour l’indépendance.
La Direction locale des Moudjahidine et des ayants droit a élaboré, à l’occasion, un programme riche comprenant des conférences et des séminaires historiques mettant la lumière sur le combat du martyr avec la participation de professeurs de l’Université «Must apha Stambouli» de Mascara et l’organisation des visites pédagogiques dans la grotte historique «Boudjlida» de la commune d’El Gâada, fief du martyr. Des documentaires sur le parcours militant de cette figure révolutionnaire seront projetés au niveau du musée de wilaya du moudjahid, selon la même source.
APS