Le pipeline South H2 Corridor, un enjeu de taille pour l’Algérie

L’Allemagne, l’Italie et l’Autriche ont déjà conclu un accord

Les pays européens, particulièrement, affectés par la crise énergétique aggravée par la guerre en Ukraine, cherchent, ces dernières années, à réorganiser leur marché de l’énergie et à limiter leur dépendance aux ressources énergétiques traditionnelles, en misant sur le développement de l’hydrogène vert avec leurs partenaires énergétiques dont l’Algérie qui s’est jointe à la course vers cette ressource. Le pays ambitionne de développer l’hydrogène vert avec ses partenaires européens de premier plan, à savoir, l’Italie, l’Allemagne et l’Autriche, engagés dans un nouveau partenariat stratégique pouvant concurrencer le projet franco-espagnol, en gestation.
En effet, un mégaprojet est actuellement en cours d’étude pour réaliser un Gazoduc d’hydrogène de 3.300 kilomètres visant à transporter de l’hydrogène renouvelable d’Algérie vers l’Europe.
Le South H2 Corridor, appellation du projet, sera réalisé en partenariat avec le groupe italien Snam Spa, le groupe autrichien Gasconnect-Austria et Trans Austria Gasleitung GmbH, le groupe allemand Bayernets GmbH. Ces pays visent à travers ce projet renforcer la transition énergétique de l’Europe et accélérer la décarbonation de divers secteurs économiques, notamment, industriels. L’Algérie s’intéresse de près à ce projet.
C’est ce qu’a confirmé, le ministre des Affaires étrangères et de la Communauté nationale à l’étranger, Ahmed Attaf lors de sa rencontre, avant-hier, à Berlin (Allemagne), avec le vice-chancelier et ministre allemand de l’Economie et du Climat, Robert Habeck.
M. Attaf a discuté avec M. Habeck des perspectives de coopération dans divers domaines et «des nouveaux projets que les deux parties aspirent à concrétiser dans le domaine des énergies renouvelables et l’hydrogène vert», a indiqué le communiqué du ministère de tutelle. Parmi ces projets celui du pipeline, South H2 Corridor, que l’Allemagne souhaite construire avec ses partenaires italiens et autrichiens afin de transporter de l’hydrogène vert d’Algérie vers le marché européen.
Un accord a déjà été conclu entre les trois parties. Le ministre a tenu d’ailleurs à saluer «l’accord conclu entre l’Allemagne, l’Autriche et l’Italie sur le projet de l’hydrogène Sud (SoutH2 Corridor), qui ouvrira la voie à un accord élargi au sein de l’Union européenne (UE) pour soutenir ce projet qui vise à couvrir 10 % des besoins énergétiques de l’Europe», lit-on dans le communiqué.
Ce pipeline d’hydrogène vert devrait partir de la ville algérienne Hassi R’mel, traverser la ville de Hassi Messaoud avant d’atteindre Sfax en Tunisie, et de là, la mer Méditerranée avant de se connecter au réseau italien existant géré par Snam SpA, et de rejoindre le marché autrichien et allemand. Ce mégaprojet permettrait à l’Algérie d’atteindre ses objectifs de développement durable et bénéficierait à la Tunisie, souhaitant profiter de cette expérience pour développer cette filière.
La production de l’hydrogène vert représente, actuellement, pour l’Algérie une opportunité intéressante afin de diversifier sa production énergétique ainsi que ses marchés traditionnels et répondre aux nouveaux besoins de ses partenaires. Pour ce faire, le pays compte sur la collaboration de ses partenaires historiques dans le domaine d’hydrocarbures.
L’Algérie a élaboré une feuille de route pour le développement de l’hydrogène pour faire du pays «un pionnier au niveau régional et international dans la production et la commercialisation de cette nouvelle énergie en œuvrant à fournir au marché européen 10% de ses besoins à l’horizon 2040», avait indiqué, au mois de mars passé, dans un communiqué le ministre de l’Energie et des Mines, précisant que «le développement du secteur de l’hydrogène en Algérie passe par trois phases principales à commencer par le démarrage et la formation (2023-2030), puis l’expansion et la création du marché (2030-2040), et enfin l’industrialisation et l’exportation (2040-2050)».
L’Etat prévoit d’investir «20 à 25 milliards de dollars US dans la production de l’hydrogène vert», avait annoncé, au mois de février écoulé, le directeur général des études économiques et de la prospective au ministère algérien de l’Énergie et des mines, Miloud Medjalled.
En plus de mettre le paquet sur les investissements dans cette filière, l’Algérie entend profiter de son savoir-faire et de ses avantages concurrentiels pour atteindre ses objectifs ambitieux et pouvoir «approvisionner le marché européen à près de 10 %, soit l’équivalent de 30 à 40 milliards de kilowatts d’hydrogène gazeux, d’hydrogène liquéfié et de dérivés de ses besoins d’ici 2040 à des prix de vente très concurrentiels». Par ailleurs, l’Algérie doit faire face à la concurrence accrue et à de nombreux défis pour produire de l’hydrogène vert.
Samira Takharboucht