Il faut attaquer à la racine du mal

Les spéculateurs de la faim à l’origine de l’inflation

La hausse exponentielle des prix des légumineuses (lentille, pois-chiche, riz…) est devenue le sujet de conversation numéro un des Algérien. Des produits consommés exclusivement en hiver, rarement en été. En plein mois d’août, les prix du riz, des lentilles, des pois-chiches, entre autres, passent du simple au double, affectant le portefeuille du citoyen et provoquant une situation de saturation et d’inflation.Face à la montée de la grogne, le Gouvernement veut se faire rassurant et accuse les spéculateurs d’être à l’origine de la pénurie et de la hausse vertigineuse des légumineuses. La chasse aux spéculateurs avides se poursuit. Des contrôles massifs sont menés par les brigades économique et financière, relevant des services de la police à travers tout le territoire national. Il y a deux semaines, les éléments de la police de la wilaya de Boumerdès ont saisi une importante quantité de riz et de lentille destinés à la spéculation. Cette opération s’inscrit dans le cadre de la lutte contre la spéculation et l’inflation.
Ce crime est lourdement sanctionné par l’Etat qui tente de réorganiser le secteur du commerce à travers la restructuration du secteur des importations, mais surtout la réorganisation des réseaux de distribution et du système d’approvisionnement du marché en produits alimentaires. C’est le maillon du système alimentaire. La distribution de gros en Algérie est très complexe et implique plusieurs intermédiaires, anarchique, ce qui profite aux spéculateurs qui profitent de la défaillance des réseaux de distribution. Ces personnes profitent, également, des insuffisances de l’organisation du secteur du commerce, en l’occurrence, des infrastructures de stockages, des réseaux de logistique et de distribution, notamment, dans le secteur privé. Des entreprises industrielles privées ont opté pour l’internalisation de leurs opérations de distribution, procédant même à la création de leur propre société de logistique.
Cependant la question de l’optimisation et la modernisation des réseaux de distribution et de logistique se pose toujours. Avoir son propre circuit de distribution et de logistique impliquerait, probablement, des frais supplémentaires supportés par l’entreprise ou le consommateur final. La distribution alimentaire dans le pays est très complexe et difficilement analysable. Pour certaines parties, ces réseaux ont une part de responsabilité dans l’aggravation du phénomène de la spéculation, par conséquent, de l’inflation. Ce qui est vrai dans tout ça est que les prix des produits alimentaires, notamment, des légumineuses ne correspondent aucunement à ceux fixés par l’Office interprofessionnel des céréales (OAIC), devenu depuis le début de l’année en cours, l’importateur exclusif des légumineuses.
Selon le ministère du Commerce, cette décision « vise à mettre un terme à l’importation aléatoire qui a impacté la production nationale dans le domaine des légumineuses, notamment après que les agriculteurs ont réalisé, ces dernières années, une production importante ». Donc l’objectif est d’encourager, entre autres, la production des cultures stratégiques dans le pays et de « maîtriser les opérations d’approvisionnement du marché et à intervenir pour subventionner les prix en cas de hausse des prix dans les marchés internationaux ».
Une décision qui a déplu à certaines parties qui expliquent la flambée des prix des légumineuses sur le marché par le monopole des importations par l’OAIC. Ce dernier a pourtant rassuré sur la disponibilité des légumineuses et a décidé de fixer plafonner les prix pour éviter leur manipulation. Ceci n’a pas empêché les commerçants de revoir les prix et de les doubler, défiant ainsi l’OAIC. Dans certaines régions du pays, ces produits sont inexistants, provoquant la colère et l’incompréhension du consommateur qui n’hésite pas à l’exprimer sur les réseaux sociaux. Ils pointent le manque de contrôle, aussi. Le citoyen met en cause les spéculateurs, les commerçants, mais aussi le manque de contrôle. La responsabilité est partagée. Le consommateur dénonce cette situation devenue intenable en pleine rentrée sociale. De son côté pour rappel, le ministre de tutelle a accusé certains importateurs, affirmant que « certains anciens importateurs de légumineuses veulent créer un problème pour reprendre l’importation et tuer la production nationale ». En effet, l’Algérie investit de plus en plus dans le développement de son agriculture, notamment, des cultures annuelles, pour se passer des importations, ce qui ne bénéficie pas aux importateurs. Ces derniers pourraient, pourtant, profiter de cet élan pour investir dans le système de production et de l’exportation, favorisant l’intérêt national avant tout.
Samira Takharboucht