Une momie révèle son «parfum éternel»

Egypte pharaonique

Un mélange de cire d’abeille, de bitume, d’huile végétale et de résine d’arbre: tel semble être le parfum de la substance qui a servi à embaumer une riche Égyptienne, Senetnay, il y a environ 3 500 ans.
Les recherches ont été menées par Barbara Huber et son équipe de l’institut Max Planck de géoanthropologie, basé à Jena, à l’est de l’Allemagne. Grâce à des techniques comme la chromatographie en phase gazeuse et la spectométrie de masse, l’équipe a pu déterminer la composition chimique du baume utilisé pour momifier Senetnay.
Comme l’explique New Scientist, ces recherches sont importantes à plus d’un titre. Elles permettent bien entendu de mieux comprendre comment l’Égypte ancienne traitait ses morts, mais identifier les produits utilisés permet également d’en savoir plus sur le type de commerce effectué par le pays il y a plus de trois millénaires –e t notamment quelles routes étaient empruntées pour se procurer certains des ingrédients.
Si Senetnay était une femme importante, ce n’est pas seulement parce qu’elle était la femme de Sennefer, qui fut maire de Thèbes: elle fut la nourrice d’Amenhotep II, septième pharaon de la XVIIIe dynastie de l’Égypte. Traitée à la mesure de son rôle et de son statut, elle fut enterrée dans la vallée des Rois près de Thèbes.
On n’avait encore jamais vu composition aussi complexe que celle du baume trouvé dans la tombe de Senetnay, explique Barbara Huber, si impressionnée par la sophistication et la longévité des fragrances qu’elle a décidé de parler de «parfum éternel».

Découverte fondamentale
La présence de résine a particulièrement intéressé son équipe: celle-ci provient majoritairement d’un conifère nommé larix, de la famille des mélèzes, mais de la résine de pistachier et une résine dure (le dammar) ont également été repérées.
Or ces trois résines n’existent pas en Égypte sous leur forme naturelle: les larix et les pistachiers poussent au nord de la Méditerranée, et le dammar provient d’arbres venant d’Asie du Sud-Est. La découverte est importante car elle prouve que l’Égypte commerçait avec l’étranger environ 1 000 ans plus tôt que ce qui était établi jusqu’ici. L’équipe de Barbara Huber s’interroge à présent sur la composition du baume et sur la sélection des ingrédients qui le composent. Certains ont-ils été choisis pour leurs caractéristiques insecticides ou anti-microbes? Cela reste à prouver. D’autres pistes restent également à explorer, les chercheurs et chercheuses ayant l’impression, pas encore confirmée, que des substances différentes ont été utilisées en fonction des parties du corps à embaumer. D’autres éléments rendent cette découverte encore plus fascinante, et notamment le fait que les funérailles de Senetnay auraient eu lieu dans des circonstances particulières. «Nous en savons peu, voire rien du tout, sur l’identité de la personne qui a mené la cérémonie et sur ce qui s’y est dit, explique Kate Fulcher, du British Museum. Tout ceci semble avoir été tenu secret, et nous ne disposons d’aucun écrit qui l’évoque.»
T. M.