Economie

Le président de la République lors du Conseil des ministres en date du 01 octobre 2023 a alerté sur la hausse des prix devenue intolérable pour le simple citoyen qui menace la cohésion sociale.

Selon le Premier ministère, l’assainissement des entreprises publiques ont coûté au Trésor public, environ 250 milliards de dollars, durant les trente dernières années à fin 2020, dont plus de 90% sont revenues à la case de départ et plus de 65 milliards de dollars de réévaluation, les dix dernières années à fin 2020, faute de maîtrise de la gestion des projets. Malgré des dépenses en devises importantes entre 2000/2020 (sans compter les dépenses en dinars), la croissance a été dérisoire, en moyenne annuelle, de 2/3%, alors qu’elle aurait dû dépasser 9/10% alors qu’il faut pour l‘Algérie un taux de croissance de 8/9% par an sur plusieurs années pour pouvoir absorber le flux additionnel d’emploi d’environ 350.000/400.000/an qui s’ajoute au taux de chômage actuel qui paradoxalement frappe les diplômés, estimé en 2022 par le FMI à plus de 14%, le taux d’emploi incluant les emplois rente improductifs.
La troisième raison, est la dépréciation officielle du dinar.
Le cours officiel est passée (cours achat) en 1970, à 4,94 dinars un dollar, en 1980 à 5,03 dinars un dollar ; – 2001 : 77,26 dinars un dollar et 69,20 dinars un euro– 2020 : 128,31 dinars un dollar ; en 2022 140, 24 pour un euro et 139,30 dinars pour un dollar. La cotation du dinar officiel connaît une dépréciation à compter les 01/02 octobre 2023 où l’euro s’échange à 154,5 dinars contre 149 dinars la dernière semaine d’août 2023 et le dollar est coté 137,16 dinars. Sur le marché parallèle l’euro s’échange le 02 octobre 2023 à 228,5 dinars à l’achat et 230,5 dinars et le dollar américain s’échange à 210,4 dinars à l’achat 210,5 dinars à la vente, l’écart en référence à l’euro étant de 49%.
Cette dépréciation officielle du dinar permet d’augmenter artificiellement la fiscalité des hydrocarbures (reconversion des exportations d’hydrocarbures en dinars) et la fiscalité ordinaire (via les importations tant en dollars qu’en euros convertis en dinar dévalué), cette dernière accentuant l’inflation des produits importés (équipements), matières premières, biens, montant accentué par la taxe douanière s’appliquant à la valeur du dinar, supportée, en fin de parcours, par le consommateur comme un impôt indirect, l’entreprise ne pouvant supporter ces mesures que si elle améliore sa productivité L’accroissement des effets inflationniste, outre l’inflation importée est la non proportionnalité entre la dépense publique et le faible impact, le taux de croissance
La quatrième raison, est l’accroissement de la population algérienne avec des besoins croissants qui a évoluée ainsi :1960 11,27, – 1970 14,69, -1980 19,47, -1990 26,24, -2010 à 37,06, au 01 janvier 2023 plus de 45 millions et d’ici 2030 serait de 51,026 millions d’habitants. ( voir étude pour la présidence de la république sous la direction du Pr Abderrahmane Mebtoul pour la révision salariale, Pression démographique , inflation et évolution salariale (4 volumes 560 pages 2008.
La cinquième raison, est l’importance du marché informel quii contrôle plus de 50% de la superficie économique. Les prix des produits non subventionnées s’alignent sur le cours du dinar sur le marché parallèle amplifiant l’inflation et s’étendant en période de crise, lié à la cotation du dinar sur le marché parallèle avec un écart entre l’officiel et le parallèle en septembre 2022 de près de 57%, une des raison des surfacturations avec certains étrangers et des transferts illicites hors des frontières des produits subventionnés. Pour la Banque d‘Algérie il y a plus de 6200 milliards de dinars de la masse monétaire en circulation hors banques soit au cours de 137 dinars un dollar 45,25 milliards de dollars. Le président de la République ayant dénoncé l’effritement du système d’information avait donné un montant variant entre 6000 et 10.000 milliards de dinars. L’anticipation d’une dévaluation rampante du dinar, a un effet négatif sur toutes les sphères économiques et sociales, dont le taux d’intérêt des banques qu’elles devraient relever de plusieurs points, s’ajustant aux taux d’inflation réel et freinant, à terme, le taux d’investissement à valeur ajoutée et par la déthésaurisation des ménages qui mettent face à la détérioration de leur pouvoir d’achat, des montants importants sur le marché. Ces derniers alimentent l’inflation, plaçant leur capital-argent dans l’immobilier, des biens durables à forte demande comme les pièces détachées, facilement stockables l’achat d’or ou de devises fortes.( voir étude sous la direction du professeur Abderrahmane Mebtoul- Institut Français des Relations internationales IFRI Paris « les enjeux stratégiques de la sphère informelle -2013-reproduite en synthèse réactualisée dans la revue Stratégie IMDEP du ministère de la Défense nationale octobre.
La sixième raison, est la fraude fiscale et la corruption à travers les surfacturations qui se répercutent sur le prix final des biens et accroît le processus inflationniste. La directrice générale des Impôts le 04 avril 2023 a fait état de 6.000 milliards de dinars d’impôts non recouvrés soit au cours actuel 44 milliards de dollars. Pour les transferts illicites de capitaux à l’étranger, selon les données du FMI les entrées en devises entre 2000/2021 sont estimées, approximativement, autour de 1100 milliards de dollars avec une importation de biens et services de plus de 1050 milliards de dollars le solde étant les réserves de change au 31/12/2020 et une surfacturions entre 10% et 15% donnerait un transfert illicite de devises entre 100 et 150 milliards de dollars entre 2000/2020 placés dans l’achat de biens, ou de tierces personnes ayant la nationalité étrangère et dans des paradis fiscaux où il est difficile de les récupérer. Attention à l’euphorie foncière de court terme notamment concernant l’ouverture des bureaux de change. L’opérationnalité suppose une démarche progressive cibler les besoins spécifiques, la stabilité juridique et monétaire par la maîtrise du processus inflationniste, la refonte du système financier dont les banques publiques accaparent plus de 85% des crédits octroyés et que si l’écart de la cotation entre l’officiel et le marché parallèle est entre 5/10% minimum, car un écart de plus de 15/20% serait contre productif car dans la pratique des affaires n’existent pas de sentiments, Car imaginons que 20 millions d’Algériens qui ont passeport sur 45 millions percevaient 1000 euros par an (il suffira de 24h de voyage en Tunisie pour permettre ce transfert), le montant de sortie de devises par an serait de 20.000.000.000 euros(20 milliards d’euros soit 20% des réserves de change à fin août 2023)
En conclusion, les deux maladies apparentes du corps social sont l’inflation et le chômage que l’on ne combat par des mesures administratives bureaucratiques, devant s’attaquer à l’essence, le fonctionnement de la société. L’Économie comme nous l’ont enseigné les classiques, Ibn Khaldoun, Adam Smith, David Ricardo, Karl Marx Joseph Schumpeter et plus près de nous entre 1950/2023 les institutionnalistes, prix Nobel, dont North Douglass, est avant tout Politique. La valeur d’une monnaie dépend avant tout de la production et de la productivité et l’influence en ce XXIème siècle d’une Nation dans les relations internationales repose avant tout sur sa puissance économique, comme c’est le cas de la Chine et de certains pays émergents ( voir nos contributions sur la géostratégie mondiale parues dans la revue El-Moudjahid Politis du 24 décembre 2023). Comprendre le processus inflationniste en Algérie implique, à la fois, de le relier à l’inflation mondiale, aux équilibres macro-économiques et macro- sociaux internes, selon une vision pluridisciplinaire dynamique, à la répartition du revenu par couches sociales, l’évolution des salaires et traitements pour déterminer le réel pouvoir d’achat. C’est un problème complexe où chaque gouvernement essaie de concilier l’efficacité économique et la nécessaire cohésion sociale, qui ne touche pas seulement l’Algérie mais la majorité des pays comme en témoignent les nombreuses revendications salariales à travers le monde. Mais existe une loi économique universelle, une Nation ne peut distribuer plus que ce qu’elle produit quitte à aller vers une dérive sociale et politique.

Abderrahmane Mebtoul Pr
des universités Expert international
(Suite et fin)