«Le football ne repose pas uniquement sur l’entraîneur»

David Bettoni (ancien adjoint de Zidane) :

,Pour David Bettonni, le football via les entraîneurs est certes un jeu, un spectacle qui draine des millions de supporters, dont ses résultats dépendent des professionnels censés connaître toutes les ficelles pour produire sur les terrains des spectacles de haute qualité.

Dans cette dernière partie consacrée à la difficulté de l’entraîneur «il n’a pas le temps d’être au four et au moulin. Il n’a pas encore ouvert la porte du vestiaire qu’il a déjà deux problèmes. Le premier, c’est qu’il n’a pas de temps. Le deuxième, c’est qu’il doit trouver l’énergie nécessaire pour parler à 25 mecs qui ne pensent pas comme lui.» Mais, pour cela, il explique qu’il «faut convaincre les joueurs d’entrée de jeu. Il faut savoir employer le verbe qu’il faut pour leur faire comprendre que le style de jeu va leur correspondre, qu’ils vont s’éclater et leur donner envie de revenir à l’entraînement le lendemain. Il n’y a pas de temps. Mais dans l’idéal, une équipe peut performer à 100% en six mois. Mais c’est super délicat de donner un temps car l’entraîneur n’a pas de temps».

Groupe restreint ou élargi ?
La méthode n’est pas simple, sa recette réside dans le fait de réunir un groupe de 20/23 joueurs, pas plus. Un tiers de joueurs expérimentés et aguerris, et à fort potentiel, c’est-à-dire des jeunes qui ont déjà joué en pro à qui il manque encore un petit truc, et un tiers de jeunes. En deux mots, sa réussite réside dans la créativité, la jeunesse, la fraîcheur, la progression, c’est ce qui l’attire. Son expérience lui fait dire qu’il ne faudrait surtout pas tenter de mettre en place les stratégies des grandes équipes mondialement reconnues en tant que telles…Le club choisi et les résultats visés, le pourcentage peut s’ajuster. «Tu n’entraînes pas le Real comme tu entraînes Montpellier. Il faut plus de joueurs aguerris au Real. Pour que les jeunes parviennent à vivre avec de grands joueurs, il n’en faut pas beaucoup car tu as besoin de temps pour t’occuper d’eux».

Le processus pour imposer
sa patte
La réussite de ces expériences repose sur la force et la qualité de l’entraîneur qui a intérêt d’aller vite. J’ai mis en place une méthodologie de travail qui permet d’avoir le maximum de résultats en peu de temps. Vous me diriez que l’entraîneur a le temps. Faux ! «Quels sont les deux problèmes de l’entraîneur ? Il n’a même pas commencé à entraîner son équipe, il n’a pas encore ouvert la porte du vestiaire qu’il a déjà deux problèmes. Le premier, c’est qu’il n’a pas de temps. Le deuxième, c’est qu’il doit trouver l’énergie nécessaire pour parler à 25 mecs qui ne pensent pas comme lui. Il faut convaincre tes joueurs d’entrée de jeu. Il faut leur faire comprendre que ton style de jeu va leur correspondre, qu’ils vont s’éclater et leur donner envie de revenir à l’entraînement le lendemain. Il n’y a pas de temps. Mais dans l’idéal, une équipe peut performer à 100% en six mois. Mais c’est super délicat de donner un temps car l’entraîneur n’a pas de temps.»

Comprendre ce qu’est l’ego pour commencer
«Et en te disant que derrière l’ego d’une personne, il y a quelqu’un qui veut faire les choses bien et il y a quelqu’un qui ne veut pas te manquer de respect. Ce joueur est fort mentalement». Ça ne veut rien dire non plus. «Quand je parle aux joueurs, je me mets toujours à leur niveau. Et eux-mêmes reconnaissent que tu es leur entraîneur. Si tu es un dictateur, que tu te montres constamment directif, ce n’est pas possible. Dès que tu enchaînes trois mauvais résultats, c’est fini’. Il recommande dans cette interview riche en enseignement que l’entraîneur, pour se faire respecter doit se mettre toujours à leur hauteur. Et naturellement, ils comprennent les choses. Après, évidemment qu’il faut être directif parfois. Mais ça s’explique, c’est pourquoi il faut comprendre comment tes joueurs fonctionnent et comment ils reçoivent l’information.»

Connaître la culture
des joueurs
«Oui, c’est important de connaître la culture du joueur également. Tu ne parles pas de la même manière à un Brésilien et à un Africain. Quand tu entres dans la connaissance de l’humain, tu peux mieux gérer les egos». Si le coach se prend pour le meilleur et que les joueurs suivent et font tout ce que tu dis, ça ne peut pas fonctionner. C’était possible il y a 10/15 ans. «Attention, ce n’est pas facile de gérer les joueurs, mais il n’y pas qu’eux. Tu as aussi les présidents, les supporters, plein de personnes. C’est la société qui veut ça, c’est l’évolution. Je m’occupe de moi d’abord. Si je signe dans un club et que mon objectif est de gagner le titre, je me mets la pression nécessaire». Tout repose sur l’entraîneur, c’est cet aspect qui est souvent négligé ou très mal pris en considération, d’où l’échec est garanti. «Je me concentre sur mes joueurs, mes entraînements et mes compositions».

Comprendre les journalistes
Si l’entraîneur se focalise sur lui-même, il ne peut pas se faire comprendre par ce qu’il se passe à l’extérieur car dans tous les cas, il ne peut pas contrôler ce qu’il s’y passe, affirme-t-il, mais après, «si tu commences à écouter tout ce qu’il se dit et que tu veux tout contrôler, tu ne t’en sors pas. Par exemple, si un journaliste dit que ton équipe est défensive et que tu prends en compte ce qu’il a écrit, tu vas, inconsciemment, vouloir être offensif le match suivant. Très honnêtement, je lis tout et j’écoute tout…ça me permet de comprendre comment chaque journaliste réfléchit, puisque je vais être amené à le rencontrer et qu’il va me poser des questions en conférence de presse par exemple. Je veux aussi prendre la température auprès des supporters. Je regarde tout et je suis imperméable à ça, car je reste concentré sur mon travail. On ne contrôle pas l’extérieur. Je me concentre sur moi et je me protège avant tout. En plus, on sait que dans le sport, il y a beaucoup de critiques», explique-t-il.

La nouvelle génération
de joueurs
Enfin, en conclusion, un entraîneur a tout intérêt à trouver de nouveaux leviers de motivation. Ce n’est pas facile d’être un technicien d’exception, cela demande une très large expérience. «Il y a beaucoup d’argent dans le football, beaucoup de changements aussi. Ta manière d’entraîner doit avoir une répercussion sur les joueurs, ils doivent prendre du plaisir, c’est le plus dur. Il ne faut pas s’adapter aux jeunes, il faut plutôt s’adapter à la vie tout simplement même si on a 40 ou 50 ans». Il recommande de ne pas essayer de comprendre les jeunes, «il faut comprendre comment la vie évolue. Aujourd’hui, même une grand-mère de 70 ans utilise une tablette. C’est vrai que les joueurs de la nouvelle génération veulent tout et tout de suite. S’ils veulent s’acheter un truc, ils vont sur internet, ils l’ont en trois clics. Et c’est pareil dans le foot, ils veulent jouer, gagner de l’argent, gagner des titres».

En résumé
Son dernier mot est réservé à un avertissement en l’occurrence «accompagner les joueurs et leur faire comprendre qu’il y a aussi un processus. Il faut leur inculquer le travail et la patience. C’est dur, mais c’est sur ces aspects que le métier d’entraîneur est intéressant. Il faut les mettre dans un cadre et leur éviter de répéter certaines erreurs. Le cadre n’est pas là pour instaurer une hiérarchie, il est juste là pour permettre à tout le monde de vivre de la meilleure manière possible, tous ensemble. Il faut simplement les intéresser à tes principes de jeu, à tes idées et à tes matchs. Car ils ont trop de centres d’intérêts.»
H. Hichem