Hommage au « Tigre de la Soummam », Abderrahmane Mira

Béjaïa

Enfant du village de Taghalat, surnommé à l’époque coloniale le «Tigre de la Soummam», le colonel martyr Abderrahmane Mira, chef de la wilaya-VI (1956-1957) et de la wilaya III (début 1959 au 6 novembre 1959), tombé au champ d’honneur les armes à la main il y’a 64 ans, a été ressuscité à Ath-Hyani, dans la région montagneuse d’Akbou, au sud-ouest de la wilaya de Bejaïa, par la présence et le recueillement vibrant des centaines de personnes qui se sont rassemblées, avant-hier, devant sa tombe pour commémorer l’anniversaire de la mort au combat de ce héros de la grande guerre de libération nationale. Tombé dans une embuscade que lui avait tendue, en 1959, l’ennemi 2e Régiment d’infanterie de Marine aéroporté de l’armée française à cette époque, le héros colonel Abderrahmane Mira, avait succombé en martyr après qu’il ait été touché en pleine opération jumelle, à même l’oued d’Ath Hyani. Abderrahmane Mira était de retour d’une mission de sensibilisation et de mobilisation des populations dans les régions d’Akbou et d’Ifri-Ouzellaguene, selon les témoignages de son fils Tarik Mira qui a indiqué, dans une déclaration à l’APS, que l’Istichhad (le martyr) de son père «avait donné lieu à des réjouissances coloniales hors normes qui le surnommaient l’insaisissable, car il leur avait fait voir de toutes les couleurs», dira le fils. Son corps a été exposé durant quatre jours dans son village natal de Taghalat pour frapper les esprits au village et subodorer la fin de la guerre de libération», a rappelé Tarik, soulignant, qu’«une fois ce macabre cérémonial achevé», le corps de son père a été transporté par hélicoptère vers une destination inconnue. «A ce jour, son corps n’a jamais été retrouvé», a-t-il dit. Né en 1922 à Taghalat, dans la région de Tazmalt, Abderrahmane Mira, avait rejoint la cause nationale dès 1947 où il a adhéré au Mouvement pour le triomphe des libertés démocratiques (MTLD) en France, activant avec fougue, notamment, à Aubervilliers dans la région parisienne et à Tazmalt, en faisant la navette entre ces deux points. Et c’est tout naturellement qu’il a rejoint le front et l’insurrection en novembre 1954, fondant sous sa houlette, la structure Front de libération nationale-Armée de libération nationale (FLN-ALN) dans la vallée de la Soummam et le Sahel (Mchedallah, wilaya de Bouira). Depuis lors, il n’avait pas cessé de s’investir politiquement et militairement dans la wilaya III où parmi ses hauts faits d’armes, figure la mise sur pied de compagnies d’acheminement des armes depuis la Tunisie, lui-même ayant fait le voyage plusieurs fois, ainsi que la sécurisation du congrès de la Soummam, organisé alors au nez et à la barbe de l’armée coloniale, présente en force dans la région. Le 15 mars 1956, il avait été décoré de la médaille de la résistance pour avoir réussi, dans la région de Boussaâda (wilaya de M’sila), à la tête de 350 djounoud, la première jonction entre les troupes des zones-III, IV et V qui ont formé, ultérieurement après le congrès, la wilaya III, et qui lui a valu, après le congrès, le grade de commandant, début 1957, puis sa désignation comme chef de la wilaya VI (Sahara), en remplacement du colonel Si Chérif, cible d’un assassinat. Mira rentre en Kabylie en juillet 1957 avant de rejoindre Tunis en octobre, puis retourne au poste de commandement de la wilaya-III en mars1959, et dès le mois de juillet, il a dû faire face à l’horrible opération jumelle, conduite alors par le sinistre général Challes, installé non loin du col de Chellata, sur les hauteurs d’Akbou. C’est le 6 novembre 1959, dans cette zone en feu, que Mira a rendu son dernier souffle les armes à la main, laissant derrière lui une page épique qui en a inspiré tous les patriotes et permis la victoire finale. L’anniversaire de son martyr a été l’occasion propice pour les moudjahidine rassemblés de rappeler son parcours singulier, son engagement et son amour pour la patrie. Beaucoup de témoignages de ses frères d’armes ont été apportés, clôturant une cérémonie ponctuée d’un dépôt de gerbe de fleur sur la stèle érigée dans l’oued, à son effigie, et d’une lecture de la Fatiha à sa mémoire et à la mémoire de tous ceux qui ont sacrifié leurs vies, pour l’indépendance de l’Algérie.