Arme de destruction massive de toute dénonciation du sionisme (II & fin)

L’antisémitisme

Mal nommer les choses, notait Camus, c’est ajouter au malheur du monde. Pis, c’est semer délibérément la confusion dans les esprits. Le terme antisémitisme n’a jamais été autant galvaudé qu’à notre époque propagandiste dominée par un lobbyisme sioniste outrancier et outrageant. Outre le fait qu’il désigne une réalité heureusement inexistante, c’est-à-dire une factualité fantasmagorique, l’antisémitisme est devenu, surtout, une redoutable arme de dissuasion massive de toute critique du sionisme. Un instrument de neutralisation des combattants antisionistes.
Une chose est certaine, le sionisme a partie liée avec l’antisémitisme. C’est l’avers et le revers du même phénomène suprémaciste. Le sionisme, idéologie raciste d’essence européenne, inventé par des Ashkénazes athées, est au vrai fondé sur le mépris racial des sémites. Du reste, c’est la raison pour laquelle les juifs orthodoxes ont toujours été antisionistes. Comme l’a déclaré l’historien Yakov Rabkin dans une interview accordée à Pascal Boniface : « Lorsqu’à la fin du XIXe siècle, les sionistes ont appelé les juifs à se rassembler en Palestine dans le but d’y former « une nation nouvelle », cette idée radicale en a rebuté la grande majorité, tant laïcs que pratiquants, qui ont rejeté comme absurde le concept sioniste de la nation, pastiche tardif du nationalisme européen du XIXe siècle. Par exemple, pour le rabbin Isaac Breuer (1883-1946), l’un des penseurs éminents de l’orthodoxie moderne, ce nouveau mouvement politique « est l’ennemi le plus terrible qui ait jamais existé pour le peuple juif. Le sionisme tue le peuple et élève ensuite son corps au trône ». Cette opposition ne s’est guère éteinte de nos jours ».
Le sioniste le plus hypocrite, c’est Theodor Herzl, le père fondateur de cette idéologie suprémaciste mortifère. Theodor Herzl nous est présenté comme un sioniste intègre, attaché à sa judaïté et à la Thora, scandalisé par l’antisémitisme. Au vrai, ce fut un véritable imposteur et un antisémite notoire. Il méprisait les juifs qui observaient la Torah et la tradition juive. Herzl avait des idées antisémites et décrivait les juifs comme porteurs du mal. Pour guérir les juifs de ce mal, il proposera une solution radicale.
Pour « résoudre la question juive », ce journaliste, imprégné de culture allemande et, surtout, affligé de la honte de « soi juif », ira jusqu’à proposer, comme solution radicale, la conversion de tous les juifs d’Autriche au christianisme. Pour ce faire, en 1893, il invitera le Pape de l’époque à baptiser et convertir tous les juifs, lors d’une cérémonie spéciale organisée dans l’église de Saint Stéphane à Vienne.
Dans son journal, Theodor Herzl écrit : « Voici environ deux ans, j’ai entrepris de résoudre le problème juif, au moins en Autriche, avec l’aide de l’église catholique. J’ai demandé l’aide des hauts prélats de l’église autrichienne, afin d’obtenir par leur biais, une entrevue avec le Pape, pour lui dire : « Aidez-nous avec les antisémites, et je déclencherai un mouvement formidable parmi les Juifs, qui se convertiront de façon fière et spontanée au christianisme » ».
Herzl décrit en détails la monumentale cérémonie de conversion qu’il souhaite préparer pour les juifs autrichiens. « La conversion sera effectuée en plein jour, un dimanche midi, dans la cathédrale de Saint Stéphane, par une procession joyeuse au son du clocher. Pas en cachette, selon la coutume des Juifs jusqu’à ce jour, mais la tête haute. Le fait que des leaders juifs qui conservent leur Judaïsme accompagnent leur peuple jusqu’aux portes de l’église, garantira la sincérité de la démarche. Nous, qui avons résisté courageusement, sommes la dernière génération attachée à la fois de nos pères. Mais nous voulions convertir nos enfants au christianisme avant qu’ils n’arrivent à l’âge de la raison, âge auquel la conversion revêt une forme de lâcheté », notait-il.
De manière générale, si l’antisémitisme avait servi d’instrument de manipulation idéologique pour réaliser le projet colonial sioniste en Palestine, depuis quelques décennies il est employé comme arme de neutralisation de tous les combattants antisionistes. En France, l’antisémitisme est devenu une redoutable arme pour étouffer les antisionistes. N’est-ce pas au nom de l’antisémitisme qu’on veut réduire au silence toute critique du sionisme, de l’État fasciste israélien ? Le brandissement systématique du bouclier de l’antisémitisme vise à assimiler toute critique et dénonciation du sionisme et d’Israël à de l’antijudaïsme. L’arme massive dissuasive de l’antisémitisme a été inventée par les sionistes pour neutraliser et criminaliser toute critique et dénonciation politique du sionisme. Pour anéantir tout combat politique antisioniste.
Interviewé par Pascal Boniface sur « les affirmations des responsables institutionnels, des intellectuels communautaires et certains hommes politiques de France, selon lesquelles l’antisionisme n’est que le masque d’un antisémitisme qui n’ose pas ou qui n’ose plus s’afficher au grand jour », le professeur Yakov M. Rabkin a donné cette longue réponse qui vaut son pesant d’or : « Ces accusations sont fausses et cyniques. Fausses parce que le sionisme constitue une rupture dans la continuité historique du judaïsme.
Les intellectuels sionistes et les rabbins orthodoxes qui s’y opposent s’entendent sur le fait que le sionisme représente une négation de la tradition juive. Selon Yosef Salmon, expert israélien de l’histoire du sionisme : « Le sionisme a posé la plus grave des menaces parce qu’il visait à voler à la communauté traditionnelle, tant au sein de la diaspora qu’en Eretz Israël [Terre d’Israël], tout son patrimoine, à lui enlever l’objet de ses attentes messianiques. Le sionisme défiait tous les aspects du judaïsme traditionnel : dans sa proposition d’une identité juive moderne et nationale, dans la subordination de la société traditionnelle à des styles de vie nouveaux, et dans son attitude envers les concepts religieux de diaspora et de rédemption. La menace sioniste a atteint chaque communauté juive. Elle était implacable et frontale, et l’on ne pouvait lui opposer qu’un rejet sans compromis ». Comme le montre un autre historien israélien, Noah J. Efron, c’est plutôt la société israélienne qui manifeste des attitudes ouvertement antisémites à l’égard des juifs traditionnels […]. Les accusations qui font l’amalgame entre l’antisionisme et l’antisémitisme sont, en outre, cyniques parce que ce sont les sionistes qui ont accepté la thèse centrale des antisémites selon laquelle les juifs constituent un corps étranger au sein des nations européennes. Depuis le début, il existe une confluence d’intérêts entre les antisémites, qui veulent se débarrasser des juifs, et les sionistes, qui veulent les concentrer tous sur un territoire. C’est à l’État d’Israël que profite avant tout l’antisémitisme, en augmentant sa population juive, en y attirant tous ceux qui se sentent menacés par les antisémites. De nos jours, les leaders israéliens s’inquiètent ouvertement de ce qu’ils appellent « la bombe démographique », c’est-à- dire la perspective que les juifs redeviennent une minorité au sein de l’État sioniste. Pour pallier cette menace, ils ont besoin de l’aliya (immigration de juifs en Israël). Or c’est l’antisémitisme plutôt que l’idéalisme qui encourage d’habitude l’aliya.
C’est également l’antisémitisme qui justifie le sionisme, pour lequel l’existence de communautés juives libres et prospères à travers le monde constitue un problème idéologique fondamental ». (…) L’association automatique des juifs à l’État d’Israël est fondamentale pour les sionistes qui, depuis les origines de ce mouvement politique il y a plus d’un siècle, se présentent comme les représentants du peuple juif tout entier. En se proclamant « l’avant-garde du peuple juif dans son ensemble », en parlant « au nom du peuple juif » les sionistes renforcent l’association automatique des juifs avec l’État Israël. Cela ne fait qu’encourager l’antisémitisme dans le monde en tribalisant le conflit et en l’exportant hors des frontières d’Israël. Or il est grave que les juifs – minorité avant tout religieuse que la tradition oblige à la pudeur, la miséricorde et la bienfaisance – soient de plus en plus associés aux images de soldats et de colons armés qui remplissent les écrans de télévision du monde entier ».
C’est avec des arguments des antisémites que les sionistes auront bâti leur « foyer national juif » colonial. Les antisémites prétendent que les juifs ne veulent s’entendre avec aucun peuple, ne veulent pas s’intégrer dans les pays où les vivent.
Des arguments cautionnés et repris à leur compte par le sionisme pour justifier la création de la colonie juive en Palestine.
Et c’est avec les mêmes arguments que le sionisme dénigre les combattants antisionistes du monde entier, qui soutiennent que tous les juifs ont leur place dans leur pays d’origine, y compris les juifs établis en Israël, à condition qu’ils abjurent l’idéologie suprémaciste sioniste, qu’ils renoncent définitivement à la colonie israélienne, qu’ils consentent que les Palestiniens recouvrent leur souveraineté sur leur terre.
De même, quand les antisionistes dénoncent l’existence de l’État colonial sioniste, appellent en toute fraternité les occupants juifs, pour mettre un terme à la colonisation du peuple palestinien, à regagner leur « foyer national d’origine », ils sont taxés d’antisémitisme.
« L’antisémitisme », ce concept européen, est le poison dont se nourrit le sionisme pour tromper les juifs, abusés par cette doctrine suprémaciste et belliciste ; pour empoisonner la vie des vrais sémites palestiniens, colonisés et massacrés ; pour accuser les peuples du monde entier d’être antijuifs, pour s’être levés pour combattre le dernier vestige colonial occidental, Israël.
L’écrivain algérien, Tahar Djaout, premier journaliste assassiné au cours de la décennie noire par les islamistes, frères siamois des sionistes, avait dit « Le silence, c’est la mort. Et toi, si tu parles, tu meurs. Si tu te tais, tu meurs. Alors, dis et meurs ! ».
Avec les sionistes, si on combat Israël, on est accusé d’antisémitisme. Si on soutient, seulement humainement, les Palestiniens, on est accusé également d’antisémitisme. Alors, combattons Israël et soutenons les Palestiniens, quitte à subir les accusations d’antisémitisme.
(Suite et fin)
Khider Mesloub