La grandeur et la pertinence du mois sacré du Ramadhan

Islam

Institué à Médine en l’an 624, le jeûne du Ramadhan est une commémoration de la première révélation faite au Prophète Mohammed (QSSL) au neuvième mois de l’année lunaire. C’est un moment de piété, de joie et de générosité, où l’individu est attentif aux plus démunis et renforce les liens avec la communauté religieuse. Le pratiquant observe la prière, une stricte abstinence diurne et le rite de la rupture du jeûne au coucher du soleil.

Ainsi, les musulmans ont le devoir de prier, de réfléchir à la place de la foi dans leur vie et à la manière de développer leurs qualités humaines, telles que la patience, la douceur, la compassion et l’humilité. Enfin, ils pratiquent l’aumône zakât al-fitr, qui consiste à verser une taxe obligatoire à la mosquée ou à un individu dans le besoin, juste avant la fin du Ramadan. À la tombée de la nuit, les fidèles se réunissent en famille et entre amis pour prendre un repas de fête. Le premier jour du mois suivant, l’Aïd al-Fitr, la fête de la rupture du jeûne, est célébrée dans une grande liesse.
Le mois de Ramadan est une occasion unique dans l’année de se rapprocher de Dieu le Tout-Puissant. Les choses que l’on peut faire pendant ce mois, la dévotion que l’on a, sont incomparables avec le reste de l’année. Cela se voit dans le nombre de personnes qui fréquentent les mosquées pendant ce mois : la fréquentation double. Et là aussi, c’est une ambiance unique où les membres de la communauté se retrouvent plus souvent pour les cinq prières et prennent le temps de discuter après la prière du soir.
Le jeûne vise à rapprocher les fidèles de Dieu par le sacrifice et l’abnégation. C’est également un mois de gratitude au cours duquel les fidèles se souviennent des souffrances des moins fortunés. L’Islam demande également aux fidèles de s’éloigner des plaisirs matériels et de se concentrer sur leurs pensées et leurs actions. Le jeûne est considéré comme une purification physique et spirituelle. Les musulmans font souvent des dons aux nécessiteux et aux organisations caritatives pendant le Ramadan. Beaucoup passent plus de temps à la mosquée ou utilisent leur temps libre pour réciter le Saint Coran.
Le jeûne permet de développer l’endurance, la force de volonté, l’autodiscipline et l’introspection, qui sont des qualités indispensables à la soumission à Dieu. En même temps, le fidèle exerce son âme à craindre Dieu et à grandir en piété. Il s’agit de se priver pour favoriser la spiritualité et la réflexion.
@L’idée n’est pas de cesser de manger comme un rituel en soi, c’est aussi une forme de contrôle et d’ascétisme.
Rappelons que la piété est une dévotion, un attachement respectueux et fervent à Dieu et à la religion, en l’occurrence l’islam. Cela implique l’adhésion et le respect de tous les principes et préceptes prônés par l’islam, ainsi que ce qui relève des obligations et ce qui n’en relève pas. Il s’agit notamment des prières, des invocations, du jeûne, de la charité, de l’aumône, de la lecture du Saint Coran, de la retraite spirituelle, etc. Il est recommandé d’éviter tout ce qui est contraire à la volonté de Dieu, notamment l’hypocrisie, la tricherie, le vol, le mensonge, la violence, l’adultère, le meurtre, la jalousie, la méchanceté, la corruption… bref, tous les vices et tout ce qui peut polluer notre esprit. Cependant, tout être humain est susceptible de commettre des péchés ; il s’agit ici de faire des efforts pour se rapprocher de Dieu en multipliant les actes de foi et de piété.
La sourate 2, verset 177 du Saint Coran peut, en effet, nous guider dans cette démarche et notamment en ce mois sacré de Ramadan :
“La bonté pieuse ne consiste pas à tourner vos visages vers le Levant ou le Couchant. Mais la bonté pieuse est de croire en Allah, au Jour dernier, aux Anges, au Livre et aux prophètes, de donner de son bien, quel qu’Amour qu’on en ait, aux proches, aux orphelins, aux nécessiteux, aux voyageurs indigents et à ceux qui demandent l’aide et pour délier les jougs, d’accomplir la Salât et d’acquitter la Zakât. Et ceux qui remplissent leurs engagements lorsqu’ils se sont engagés, ceux qui sont endurants dans la misère, la maladie et quand les combats font rage, les voilà les véridiques et les voilà les vrais pieux ! “

Partager la nourriture du Ramadan avec les nécessiteux est une obligation morale
Le jeûne permet de développer l’endurance, la force de volonté, l’autodiscipline et l’introspection, qui sont des qualités indispensables à la soumission à Dieu.
En même temps, il exerce l’âme à craindre Dieu et à croître en piété.Quatrième des cinq piliers de l’Islam, le jeûne est obligatoire et correspond pour les croyants à une période de rupture, de dépouillement, de partage : chacun doit s’abstenir de boire, de manger, de fumer et d’avoir des relations sexuelles du lever au coucher du soleil. A cet égard, Allah le Tout-Puissant, dit (Saint Coran, 2 :138) :“O les croyants ! On vous a prescrit as-Siyâm comme on l’a prescrit à ceux d’avant vous, ainsi atteindrez-vous la piété. “
Seuls les malades, les femmes enceintes ou les voyageurs peuvent l’éviter, mais ils devront “compenser” par d’autres jours d’abstinence dans l’année ou par une aumône (Saint Coran, 2 :184) :“ pendant un nombre déterminé de jours. Quiconque d’entre vous est malade ou en voyage, devra jeûner un nombre égal d’autres jours. Mais pour ceux qui ne pourraient le supporter qu'(avec grande difficulté), il y a une compensation: nourrir un pauvre. Et si quelqu’un fait plus de son propre gré, c’est pour lui ; mais il est mieux pour vous de jeûner ; si vous saviez !
Le pratiquant peut librement choisir une autre période de l’année, tant que le jeûne est effectué selon les règles et dans la continuité. Le fait d’interrompre délibérément le jeûne, de manquer des jours ou d’enfreindre l’une des règles entraînera deux mois de jeûne supplémentaires pour chaque jour manqué. Ce jeûne expiatoire peut être remplacé par un don monétaire ou alimentaire pour les personnes dans le besoin. C’est également le cas pour les personnes exemptées, comme les malades chroniques ou les femmes enceintes, qui ne peuvent jeûner sans mettre leur vie en danger.

L’entraide et le partage
Outre la prière, des règles strictes sur le contrôle des besoins et des plaisirs corporels rythment la vie quotidienne du croyant durant le Ramadan. Le croyant doit s’abstenir de boire, de manger, de faire l’amour et de désirer de l’aube au coucher du soleil. À ce moment-là, il rompt le jeûne iftâr par un repas équilibré et maigre et prendra un second repas juste avant le lever du jour : le sohour. Le ramadan, bien qu’obligatoire, il est flexible. Il témoigne d’une attitude compréhensive à l’égard de chaque pratiquant. Cet acte de générosité envers les nécessiteux n’est pas enfermé dans le registre de la punition, mais dans la conscience d’une vie en communauté. Véritable fête, le Ramadan, qui prône la privation individuelle, est aussi une forme de solidarité et de partage alimentaire qui dépasse les frontières familiales et religieuses. L’acte de foi individuel va de pair avec le désir de justice sociale collective.
Trois périodes de dix jours ponctuent ce mois sacré. La première est consacrée à la sollicitation de la bénédiction de Dieu. La deuxième est tournée vers le repentir et le pardon. Pendant la troisième, on cherche à se protéger des feux de l’enfer. Le Ramadan culmine lors de l’une des nuits les plus étranges de la dernière période : c’est la “Nuit du Destin” (Laylat-al-Qadr), une nuit qui “équivaut à mille mois” selon le Saint Coran (97 : 1-5) :Nous l’avons certes, fait descendre (le Coran) pendant la nuit d’Al-Qadr.Et qui te dira ce qu’est la nuit d’Al-Qadr ?
La nuit d’Al-Qadr est meilleure que mille mois.Durant celle-ci descendent les Anges ainsi que l’Esprit, par permission de leur Seigneur pour tout ordre.Elle est paix et salut jusqu’à l’apparition de l’aube.Elle est inestimable car elle est étroitement liée au Saint Coran. Il y a au moins cinq mérites de Laylat al-Qadr :1 – Le Coran a été révélé la nuit du Destin : ” Voici, Nous avons révélé ceci (le Coran) la nuit du destin. ” (Saint Coran, 97 : 1).2 – Elle est meilleure que mille mois ou 83 ans et 4 mois : ” La Nuit du Destin est meilleure que mille mois. ” (Saint Coran, 97 : 3). 3 – Dieu efface tous les péchés antérieurs du fidèle : Le Messager d’Allah (psl) a dit : iv” Celui qui se tient debout (dans la prière nocturne volontaire du) Ramadan par foi et dans l’espoir d’une récompense, ses péchés antérieurs seront pardonnés. Et quiconque passe la nuit de Lailat Al-Qadr en prière par foi et dans l’espoir de la récompense, ses péchés antérieurs seront pardonnés.”
4 – Dieu répond à toutes les invocations en cette nuit.5 – Dieu libère autant de personnes du feu de l’enfer en cette nuit qu’il en a libéré depuis le début du Ramadan.La Nuit du Destin commémore le moment exact où le Saint Coran a été révélé au prophète Mohammed (psl). Elle est susceptible de se produire n’importe quelle nuit de la dernière période de dix jours, et les grands avantages qu’elle offre seront révélés au croyant qui la recherche assidûment par la prière et l’observation du jeûne, tout comme le Saint Coran s’est révélé au Prophète.
M.CH
(A suivre)

 

 

Le jeûne dans les religions du livre et autres croyances

Mais comme l’indique le verset (2 :183) du Saint Coran, cité plus haut, le jeûne religieux est une pratique antérieure à l’Islam. Les fidèles d’Abraham jeûnaient aux éclipses, aux équinoxes et aux solstices. La religion israélite connaît des jeûnes périodiques, dont le plus célèbre est le Yom Kippour. v Le carême est une période de 40 jours pendant laquelle le chrétien se prépare à Pâques en jeûnant chaque année. Les Sabéens jeûnaient 30 jours par an ; les plus pieux jeûnaient le dimanche et le lundi. Les zoroastriens, les totémistes, les prêtres amérindiens jeûnent en diverses occasions.
Sylvie Briet a écrit sur ce sujet dans Sciences et Avenir ce qui suit : vi“Moïse, Jésus, Mahomet : les trois ont jeûné dans le désert. Yom Kippour, carême, ramadan : trois manières d’observer le jeûne. Nées au Moyen-Orient, dans des paysages de sable et de soleil, les trois grandes religions monothéistes ont inscrit cette pratique dans leur calendrier. La durée varie, les modalités ont évolué au fil des siècles, mais pour toutes, le temps de la diète est l’occasion de se recentrer sur le spirituel, de s’ouvrir au partage. Une autre façon d’être au monde. Le ramadan correspond au neuvième mois du calendrier lunaire, durant lequel l’archange Gabriel a révélé le Coran à Mahomet, selon l’islam. Le jour exact de son commencement n’est décidé qu’à la toute fin du mois précédent le jeûne — le mois de Chaabane — et s’achève le premier jour de Chawwal, lors des fêtes de “rupture du jeûne”, l’Aïd el-Fitr. Le Conseil français du culte musulman (CFCM) se réunit chaque année pour annoncer la date précise du début du ramadan. “
De même, selon Cultural Awareness International, le jeûne est une pratique courante dans de nombreuses religions et philosophies : vii
“Les religions et les philosophies qui pratiquent le jeûne comprennent : Le bouddhisme, le christianisme, l’islam, le judaïsme, le taoïsme, le jaïnisme et l’hindouisme. Le jeûne peut durer quelques heures ou même quelques semaines, les pratiquants mangeant généralement le soir. Il est intéressant de noter que, même au sein d’une religion, les différentes dénominations ou sectes peuvent jeûner différemment ou à des moments différents. Par exemple, au sein du christianisme, il existe plusieurs dénominations différentes qui jeûnent à des moments différents. Les catholiques ne mangent pas de viande le vendredi pendant le Carême, tandis que les chrétiens coptes, la principale forme de christianisme en Égypte, jeûnent pendant des durées différentes pendant un total de 210 jours au cours de l’année. Ils ont huit jeûnes principaux, et chacun dure une durée différente et restreint le régime alimentaire d’une manière unique. “

Chez les Juifs, l’expiation et le pardon de Yahvé

Cette pratique était déjà profondément ancrée dans la tradition judéo-chrétienne, comme en témoignent les nombreuses références dans l’Ancien Testament. A plusieurs reprises, le peuple juif a jeûné pour mettre fin à une calamité, pour expier ses fautes ou pour demander le pardon de Yahvé. Si la religion des Hébreux s’est construite en opposition à la dimension magique des croyances mésopotamiennes, elle en a repris certains principes, notamment les restrictions alimentaires. viiiAujourd’hui, pour les Juifs, le principal jour de jeûne est Yom Kippour, un temps de repentance, de pardon et de réconciliation. “Car en ce jour, l’expiation est faite pour vous, pour vous purifier de tous vos péchés devant le Seigneur“, dit le Lévitique, l’un des cinq livres de la Torah. Le compte à rebours commence le jour du nouvel an juif, Rosh Hashanah, qui tombe en septembre ou en octobre, selon les années. Les fidèles observent dix jours de repentance et le dixième jour – Yom Kippour – ils s’abstiennent de boire, de manger, de travailler, de se laver ou d’avoir des relations sexuelles du crépuscule de la veille au crépuscule du lendemain. D’autres actions sont interdites, comme l’utilisation de pommade ou le port de chaussures en cuir. Il s’agit d’un rituel d’introspection au début de l’année, d’une restauration de la pureté. Le peuple juif examine les péchés commis et procède à un examen de conscience, qui culmine à Yom Kippour, pour ressortir complètement pur. La tradition juive est riche d’une infinité de commentaires, dont certains relient cette purification à celle effectuée sur le mont Sinaï où Moïse a reçu les tables de la Loi. Il existe six autres jours de jeûne, moins suivis, mais tous liés à l’histoire du peuple juif comme celui qui commémore les deux destructions du Temple de Jérusalem, appelé Ticha Beav. ix

Le carême, un temps de prière sans ostentation

Comme l’islam, le christianisme s’est inspiré du jeûne juif, à commencer par Jésus. Juste après son baptême, il se retire dans le désert et jeûne pendant 40 jours, une période qui fait écho à celle observée par Moïse qui n’a ni mangé ni bu pendant 40 jours et 40 nuits sur le mont Sinaï. x Cet épisode de l’Évangile est connu sous le nom de “Tentation du Christ”, car le diable en a profité pour le tester à plusieurs reprises. Les disciples, eux, n’ont pas jeûné. Lorsque les Juifs lui demandent pourquoi, Jésus répond : “Les compagnons de l’époux peuvent-ils se lamenter pendant que l’époux est avec eux ? Mais il viendra des jours où l’époux leur sera enlevé, et alors ils jeûneront.”
Le Book of Common Prayer xi énumère 16 jours observables pour les veillées, les jeûnes et les commémorations : la Didaché xii ordonnait des jeûnes le mercredi et le vendredi ; les catholiques romains exigent que le vendredi, aucun repas ne soit pris ; les carmes, les chartreux et les cisterciens ordonnent un jeûne régulier, mais chez d’autres, il est pratiquement inexistant.

Le jeûne, aussi pour protester contre la violence

Les premiers chrétiens observaient une diète les mercredis et vendredis ainsi qu’une semaine avant Pâques. Au quatrième siècle, ils ont étendu cette période à 40 jours avant Pâques, en référence au jeûne du Christ. C’est le carême,xiii un temps de prière, de partage et d’abstinence auquel les fidèles sont censés s’adonner sans ostentation, tout comme l’aumône et la prière doivent être observées en secret. La pratique s’est allégée au fil du temps.
Aujourd’hui, l’Église catholique impose un jeûne le mercredi des Cendres et le vendredi saint (jour de la crucifixion). Par extension, chaque vendredi, on ” mange maigre “, c’est-à-dire sans viande, d’où le choix du poisson. Lors de la fête de Pâques (résurrection de Jésus), qui clôt cette période, il est de tradition de manger l’agneau pascal, également symbole pour les Juifs lorsqu’ils célèbrent Pessah.
Si le jeûne traverse les siècles, il peut prendre aujourd’hui une connotation plus politique. Par exemple, après les attaques terroristes du 7 janvier 2015 à Paris, un prêtre, un rabbin et un musulman, rejoints par un moine bouddhiste, ont appelé à un jeûne interconfessionnel pour protester contre la violence. Des milliers de personnes ont immédiatement répondu à cet appel.
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Cf. Thurston, Herbert. Lent and Holy Week. London: Longmans Green, 1904.
(A suivre…)