Impacts géostratégiques et énergétiques

Tensions Iran – Israël

Le 15 avril 2024 en clôture, le Brent a été coté à 90,41 dollars (84,86 euros) et le Wit 85,69 dollars (80,42 euros), malgré l’attaque de l’Iran contre Israël, le marché tablant sur une désescalade plus probable qu’un embrasement de la région, surtout après la décision américaine, principal allié d’Israël, et les recommandations de la communauté internationale d’éviter toute escalade qui risque de plonger l’économie mondiale vers une turbulence généralisée.

En outre, l’investissement (35 % du PIB) commencera à se redresser progressivement au cours de la période à venir, principalement grâce à la reprise des relations diplomatiques avec l’Arabie saoudite en 2023 et à la hausse des investissements . En 2024, une légère augmentation de la production de pétrole (9 % du PIB) est attendue, d’environ 0,5 % par rapport à l’année 2023, pour atteindre 3,7 millions de barils par jour, en fonction de la demande de la Chine et d’autres pays asiatiques, pour laquelle l’Iran est en concurrence avec la Russie.

3.-L’Iran contrôlant le détroit d’Ormuz, acteur stratégique au niveau des hydrocarbures
Afin de combler ces besoins et faute de pouvoir s’approvisionner en produits occidentaux, l’Iran renforce ses partenariats avec les pays frontaliers et l’Asie , au premier plan, la Chine absorbant près de 90% des exportations de brut iranien (1,3 MB/j en 2023 souvent à des prix préférentiels comme d’ailleurs la Russie en direction de l‘Inde et de la Chine. L’Iran étant un acteur stratégique majeur de la région contrôle le détroit d’Ormuz bordé par le sultanat d’Oman reliant le Golfe persique à la mer d’Arabie et à l’Océan Indien. Cet étroit passage maritime est l’un des points névralgiques du commerce mondial, ce qui lui confère une haute importance stratégique. Plus des trois-quarts de ces exportations sont destinés aux pays d’Asie, en premier lieu la Chine, l’Inde et le Japon. Si l’Arabie saoudite et les Émirats ont établi un réseau d’oléoducs pour contourner le détroit, ces voies alternatives comportent en réalité des volumes limités.
Face au rétablissement annoncé des sanctions américaines sur son pétrole, Téhéran a menacé de bloquer cette voie par laquelle transitent jusqu’à 30% des exportations maritimes de pétrole, à l’extrémité des eaux du Golfe, entre l’Iran au nord, Oman et les Emirats arabes unis au sud. Sur le plan énergétique l’Iran détient 11,5% des réserves mondiales de pétrole conventionnel, la deuxième au Moyen Orient derrière l ‘Arabie Saoudite ( la première réserve mondiale étant le Venezuela mais pétrole lourd ), le quatrième producteur mondial entre 3,5 et 4 millions de barils/j et la seconde réserve mondiale de gaz derrière la Russie 15% des réserves mondiales et sa capacité de production de gaz est de plus d’un milliard de mètres cubes par jour, mais comme pour le pétrole , devant tenir compte de la forte consommation intérieure,, le prix largement inférieur au prix du marché international. L’Iran comme d’ailleurs la Russie, confrontés aux sanctions occidentales, fortement dépendante des ventes d’hydrocarbures, c’est la sécurisation de ses immenses réserves d’hydrocarbures qui le pousse à développer un programme nucléaire civil et à chercher à disposer de l’arme nucléaire parallèlement à la construction d’une importante industrie de défense conventionnelle, ces capacités militaires correspondent pour Téhéran, à un impératif de sécurisation de ses sites de production d’hydrocarbures, axé sur deux constatations stratégiques. L’Iran a tout d’abord un sentiment d’encerclement du fait de la présence militaire des États-Unis sur pratiquement toutes ses frontières terrestres et maritimes (Turquie, Irak, Koweït, Arabie saoudite, Bahreïn, Qatar, Émirats arabes unis, Oman, Pakistan et Afghanistan). Ensuite, la plupart des sites de production iraniens sont concentrés et vulnérables, car principalement situés à proximité de l’Irak ou en off-shore dans le golfe Arabo-Persique. Or deux régions d’Iran (Lorestan et Khouzistan pour le pétrole, South Pars pour le gaz) recèlent 90 % de son pétrole et 63 % de son gaz Cependant, le défi majeur défi est lié à un retour à l’accord sur le nucléaire iranien, officiellement connu sous le nom de Plan global d’action conjoint (JCPOA), dont les États-Unis se sont retirés unilatéralement en mai 2018. Un retour à l’accord semble difficile à réaliser dans le contexte géopolitique mondial actuel, malgré les récents pourparlers indirects entre l’Iran et les États-Unis.
Les relations (ou l’absence de relations) de l’Iran avec ses principaux voisins, en particulier l’Arabie saoudite, Israël, l’Égypte, la Russie, Oman et les Émirats arabes unis, continueront de façonner le paysage extérieur, ainsi que l’avenir de l’Irak, du Liban, de la Syrie, du Caucase du Sud et récemment des tensions au Moyen Orient. Les rivalités actuelles, la concurrence pour l’influence et les luttes de pouvoir régionales pourraient potentiellement accroître les tensions.

En conclusion, le Moyen-Orient en 2022/2023 , représente 32,7% de la production du pétrole et 20% du gaz naturel et pour les réserves 60% de pétrole et 40% de gaz naturel , le détroit d’Ormuz contrôlé par l’Iran 30% du transit mondial des produits d’hydrocarbures sans compte les tensions en Mer rouge, entre 12/15% du commerce mondial de marchandises, la mer Rouge jouant un rôle particulièrement important dans les échanges Europe-Asie (40 % des échanges), où selon l’Institut Kiel, un conteneur navigant entre la Chine et l’Europe est passé en moyenne de 1500 dollars à 4000 dollars. Si le conflit entre l’Iran et Israël et entre Israël et Hamas se propage aux pays voisins, les conséquences tant géostratégiques que pour l’économie mondiale pourraient être particulièrement lourdes, avec comme impact direct la fermeture du détroit d’Ormuz avec des interruptions d’approvisionnement en hydrocarbures renchérissant le coût de l’énergie de toutes les chaînes d’approvisionnement et leurs coûts de production avec un prix qui dépasserait les 100 dollars le baril, des pressions inflationnistes avec une récession économique à terme dont les premières victimes seront les pays les plus vulnérables . Espérons que la raison l’emporte sur les passions, et une des solutions pour apaiser toutes ces tensions est la création d’un Etat palestinien sur des bases fiables permettant de mettre fin à ce massacre, la cohabitation des peuples de la région dans la paix et la sécurité
Abderrahmane Mebtoul
Professeur des Universités
Expert international
(Suite et fin)