Quel impact après le retrait de l’Angola de l’OPEP et les tensions en mer Rouge sur le cours du pétrole ?

Energie

Les réserves de pétrole de l’Angola, pour 36,68 millions d’habitants au 01 janvier 2023, avec un PIB de 124 milliards de dollars en 2022, 14,50 milliards de dollars de réserves de change où les hydrocarbures représentent plus de 94% des exportations (50 milliards de dollars en 2022) sont estimées entre 8/10 milliards de barils. En plus l’Angola est également le 3ème exportateur mondial de diamants (7 ème producteur) et possède des ressources importantes de fer, de cuivre et d’or, selon Bloomberg, avec une production de plus d’1,6 million bpj en mai (978 000 bpj en mars), soit une augmentation de 91 000 bpj contre une production nigériane de 999 000 bpj en avril (1,26 million de bpj en mars), soit une chute de 270 000 barils par jour (bpj), l’Angola devient ainsi le premier producteur d’or noir du continent Afrique.

D’autres pays peuvent influer sur les cours dans la mesure où trois pays ne sont pas soumis aux quotas : la Libye un des premiers réservoir d‘Afrique avec 42 milliards de barils j, le Venezuela, premier réservoir mondial de pétrole lourd, 299 milliards de barils et l’Iran, 165 milliards de barils et ce pour des raisons politiques spécifiques, pouvant doubler, voire tripler leurs exportations, sans compter du fait des sanctions occidentales la Russie et l’Iran écoulent leur pétrole en Asie en dessous des cours affichés en bourse. Par ailleurs sur une production totale selon l’Agence internationale de l’énergie (AIE) de 102,2 millions de barils par jour en 2023, les pays hors OPEP ont accru leur production représentant plus de 50% de la production mondiale, l’OPEP 33% et l’OPEP+ après le retrait de l’Angola 45%, et les USA qui sont devenus le premier producteur mondial grâce au pétrole et gaz de schiste où en 2022 avec environ 17 millions de barils par jour contre 12 millions pour l’Arabie saoudite. Ainsi les USA dépassent les deux autres grands producteurs l’Arabie saoudite qui a diminué sa production de 2 millions de barils par jour entre août 2022 et août 2023 ( 9 millions de barils/j et la Russie également, de 9,48 millions de barils/j en octobre 2023. Malgré de nouvelles coupes dans la production annoncées en novembre, les prix du brut restent bloqués au plus bas depuis juin (entre 70 et 80 dollars le baril), tout en restant au-dessus de la moyenne des cinq dernières années. Le 22 décembre 2023 en clôture, le prix du baril de Brent de la mer du Nord était coté à 79,18 dollars et son équivalent américain, le baril de West Texas Intermediate (WTI) à 73,52 dollars, les bourses n’anticipant pas, pour l’instant une extension du conflit au Moyen/Orient. C’est dans ce cadre d’incertitude .qu’a été prise la décision de l’Angola de quitter l’OPEP à la suite d’un Conseil des ministres, tenu le 20 décembre 2023 transformée le même jour en un décret ayant force de loi, signé par le président João Lourenço de quitter l’OPEP, le communiqué soulignant que l’Angola ne gagne rien à rester dans l’organisation et pour défendre ses intérêts. L’annonce intervient après une récente décision de l’Opep d’établir un quota de 1,11 million de barils/jour (bpj) pour l’Angola, ce que le pays a contesté visant son propre objectif de 1,18 million de bpj. aux cours plombés par les anticipations de certains investisseurs qui craignent de voir la demande sapée en 2024 par une récession économique de trois espaces clefs.
La croissance chinoise qui tire la demande d’hydrocarbures à plus de 60% étant loin des attentes où selon l’agence officielle chinoise, la deuxième économie mondiale devrait enregistrer une croissance de son (PIB) de 5% l’année en 2024 si les investissements augmentent
de 4%-5%, la consommation de 6%-7% et si les exportations se redressent. La récente dégradation de la note des obligations souveraines chinoises où au 6 décembre 2023, l’indice Morningstar Chine ayant chuté de 11,9 % en 2023 et de 45 % depuis 2021, a amené de nombreux investisseurs à se demander si la Chine est encore un secteur propice aux investissements. Pour les USA nous avons une croissance de 2,3% pour 2023 et un ralentissement à 0,8% en 2024 et pour la zone euro, la croissance du PIB se limiterait à 0,6% en 2023 (-0,2 point) et 1,2% en 2024.
Le retrait de l’Angola de l’OPEP ayant eu peu d’impacts à court terme et ce quia permis au cours d’avoir une relative stabilité entre 79/80 dollars, donc pas une baisse importante, ce sont les évènements où les Houthis, rebelles yéménites ont multiplié les attaques près du détroit stratégique de Bab al-Mandab, qui sépare la péninsule Arabique de l’Afrique et par lequel transite 40 % du commerce international, la mer Rouge étant une « autoroute de la mer » reliant la Méditerranée à l’océan Indien, sur laquelle circulent chaque année quelque 20.000 navires. Suite à cela, les USA ont annoncé la création d’une coalition militaire navale de dix pays, en mer rouge constituée de la France, du Royaume-Uni, du Bahreïn, du Canada de l’Italie des Pays-Bas de la Norvège de l’Espagne et des Seychelles et certainement sera rejointe par la Chine indirectement dont une grande partie de ses exportations transitent par cette zone. Mais ce qui pourrait avoir des conséquences sur le marché des hydrocarbures, ce sont les tensions avec l’Iran où le détroit d’Ormuz, verrou stratégique du golfe Persique, une artère vitale pour l’exportation des hydrocarbures de cinq des plus gros producteurs mondiaux (Arabie saoudite, Iran, Irak, Émirats arabes unis, Koweït), un tiers des hydrocarbures transportés par tankers dans le monde et un quart du gaz naturel liquéfié (GNL) transporté par méthaniers y transitent, en moyenne, 21 % de la consommation mondiale de pétrole, 20 à 21 millions de barils par jour (brut, condensats et produits pétroliers), sans compter les porte-conteneurs et les navires militaires.

En conclusion, les facteurs géostratégiques, l’avenir de la croissance de l’économie mondiale avec les trois grands pôles USA, Europe, Asie ( Chine et Inde) les nouvelles mutations énergétiques mondiales pour lutter contre le réchauffement climatique et les actions de l’OPEP+ expliquent les fluctuations des cours du pétrole étant un marché mondial, le gaz naturel répondant à d’autres normes étant actuellement un marché segmenté.
Professeur des universités, expert internationa Abderrahmane Mebtoul