Akissi, la petite héroïne au succès mondial

Bande dessinée abidjanaise

Akissi a dix ans, mais la fillette n’a toujours pas atteint l’âge de raison. En 2010 paraîssait chez Gallimard Jeunesse, le premier album de cette petite fille intrépide et insolente, qui fait les 400 coups dans les rues d’Abidjan. Le dixième album de la série, «Enfermés dedans» vient de paraître.

Imaginée par Marguerite Abouet après le succès de sa série Aya de Yopougon, Akissi continue à faire rire les jeunes lecteurs et son succès est désormais mondial. Akissi a dix ans, mais elle existe dans l’esprit de sa créatrice, depuis bien plus longtemps. «J’ai beaucoup été nounou plus jeune», se souvient la scénariste née en 1971 à Abidjan et installée en France depuis l’âge de douze ans. «Je lisais beaucoup d’histoires à ces chères têtes blondes… Mais il n’y avait jamais d’histoires avec de petits Africains et je me suis mise à leur raconter mes bêtises d’enfant. Ils étaient fascinés, ils riaient tout le temps, c’est drôle et ce sont les parents qui m’ont poussée à faire quelque chose de ces histoires».
Marguerite Abouet commence en 2005 à raconter son adolescence en imaginant les aventures d’Aya de Yopougon, une série dessinée par Clément Oubrerie, qui connaît un grand succès et est récompensée du 1er prix au festival d’Angoulême en 2006. Cinq ans plus tard, la conteuse donne naissance à Akissi, sorte de petite sœur d’Aya et de lointaine descendante africaine de la Sophie de la Comtesse de Ségur. La petite fille effrontée se mêle de tout dans son quartier, fait comme les garçons et n’est qu’un margouillat aux yeux de son grand frère Fofana. Si Marguerite Abouet s’est beaucoup servie de ses bêtises d’enfance pour imaginer celles d’Akissi, elle dit s’inspirer également de celles de son frère, de ses amis ou maintenant de ses neveux qu’elle voit régulièrement quand elle retourne en Côte d’Ivoire. Elle y a d’ailleurs emmené récemment le dessinateur Mathieu Sapin.
C’est lui qui met en images ses récits, même si les traits d’Akissi, de ses parents, frère et sœur ou amis, ont été fixés par Clément Oubrerie. «Marguerite me raconte beaucoup les histoires et comment évoluent les personnages, confie Mathieu Sapin. Il a pu arriver qu’elle me donne des photos pour nourrir les dessins. Et récemment, elle m’a emmené à Abidjan et dans son village ce qui est idéal pour ensuite dessiner les aventures d’Akissi.»

Enfermés dedans
Dans le nouveau tome de ses aventures, Enfermés dedans, Akissi pique le vélo reçu à Noël par Fofana. Car elle n’apprécie guère la poupée qu’elle a reçue du père Noël, préférant s’occuper (mal) des véritables bébés du quartier. Mais surtout, elle vit l’expérience du confinement. Marguerite Abouet et Mathieu Sapin montre des parents tout d’abord pleins de bonne volonté, inventant une routine : travail scolaire le matin, jeux l’après-midi. Avant que cette organisation ne soit mise à mal par l’enfermement, et que tous se battent pour sortir le singe Boubou. «On s’est inspirés de l’actualité, reconnaît Marguerite Abouet, parce qu’il y avait beaucoup de choses à raconter. C’était assez drôle de montrer le confinement en Afrique. Ils sont comme nous, à un moment c’est sympa d’être ensemble avec ses enfants et quelques jours c’est n’importe quoi !» «Et puis cela permet aussi de montrer que c’est quelque chose qui a été vécu mondialement», souligne Mathieu Sapin.
Les lecteurs du monde entier pourront donc s’identifier d’autant que le succès de la série ne se dément pas, au grand plaisir de Mathieu Sapin : «C’est une série très empruntée dans les bibliothèques. Et puis on est fiers que cette série voyage. Il y a beaucoup d’éditions étrangères : Corée du Sud, Suède, Brésil, Angleterre et États-Unis. Quelque chose d’intime, propre à Marguerite voyage. Cela montre que le personnage est très universel.» Universelle, mais aussi si singulière, cette petite Akissi partage à chaque album une idée d’activité ou une recette de cuisine. Cette fois-ci, elle nous livre son secret pour confectionner de délicieux claclos, des beignets ivoiriens savoureux et appétissants.
S. T.