Une décision paradoxale et préjudiciable, selon les députés

Proposition du PLFC 2020 d’augmenter les prix du carburant

L’augmentation des prix du carburant aura, en effet, des conséquences considérables sur le pouvoir d’achat, mais aussi sur les entreprises économiques. Jugeant le moment «inopportun» par rapport au fort impact de la crise sanitaire du nouveau coronavirus sur l’économie nationale et les revenus intérieurs, les membres de la Commission des finances et du budget de l’Assemblée populaire nationale (APN) ont contesté la hausse des prix du carburant qui pourrait avoir, selon eux, des conséquences fâcheuses au regard de la conjoncture exceptionnelle, marquée par le manque de ressources.

Ils ont mis en garde contre «les retombées socio-économiques de la hausse des prix de carburants, proposée dans le projet de loi de Finances complémentaires (PLFC) pour l’exercice 2020», et estimé que la décision est en inadéquation avec la situation. «C’est un paradoxe», notent-ils. L’information de la hausse des prix du carburant, prochainement, a largement été relayée par les médias nationaux, suscitant de vives réactions dans la société et parmi les députés qui n’ont pas hésité à avertir sur l’impact dangereux d’une telle décision sur les capacités financières du consommateurs, mais aussi des entreprises qui font déjà face à de grandes difficultés financières. En imposant une nouvelle tarification durant cette période particulière marquée par la crise sanitaire conjuguée à une situation financière globalement inconfortable, en raison de crise pétrolière mondiale qui a impacté l’investissement et la production nationale et par conséquence, les revenus du pays en devises qui sont en érosion, l’Etat s’attirera la foudre sociale.
«Le moment est inopportun», jugent les députés. Sachant que généralement la décision de la hausse des prix du carburant obéit à la situation évolutive des cours du pétrole sur le marché mondial. Certes, cette augmentation devrait avoir un effet positif sur le budget de l’Etat qui connaît depuis plusieurs mois ou années l’accentuation des déficits et un déclin économique sans précédent dans la conjoncture actuelle. Par ailleurs, il faudrait assumer la déprime sociale car la hausse des prix du carburant réduiront le pouvoir d’achat et affecteront la consommation des ménages. Une situation qui semblent attirer l’attention des députés qui alertent sur les risques qu’encourent le consommateur si les prix du carburant venaient à augmenter, justifiant leur position par la difficulté financière des ménages, des smicards, des journaliers et des ouvriers qui subissent la double conséquence de la crise sanitaire et économique. En parallèle de cette décision qui divise les députés, la revalorisation du Salaire national minimum garanti (SNMG) à 20.000 dinars et l’exonération des salaires inférieurs ou équivalents à 30.000 dinars de l’impôt sur le revenu global (IRG), a reçu un écho favorable des députés qui ont salué cette initiative.
Pour argumenter leur position, les membres de ladite commission ont estimé que la révision controversée des prix de carburants «entraînera une hausse des charges de la production industrielle, des agriculteurs et du transport public, voire une hausse généralisée des prix de la quasi-totalité des produits». Un poids que ne pourrait pas supporter les entreprises économiques en détresse financière et qui craignent de déposer le bilan avant la dissipation de la pandémie, alors que des centaines de milliers d’entreprises sont déjà menacées de fermer en raison de la situation actuelle. Elles n’arrivent plus à assumer leurs charges fixes et les risques sur leurs investissements.
Pour éviter d’aggraver l’état de ces opérateurs économiques, les députés ont estimé qu’«il aurait été plus judicieux d’accélérer le recouvrement fiscal, d’orienter le soutien de l’Etat exclusivement vers ceux qui y ouvrent droit par des mécanismes de ciblage efficients et d’engager l’intégration des travailleurs du marché parallèle dans le circuit officiel, ce qui permettra d’engranger des montants colossaux qui viendraient réduire ainsi le déficit budgétaire». En résumé, ils proposent de soutenir les personnes touchées particulièrement par la crise. Confortant ainsi les plaidoiries de plusieurs experts de régulariser l’argent de l’informel qui cause un préjudice estimé à des milliards de dinars annuellement au Trésor public. D’autre part, la décision de l’autorisation de l’importation des véhicules divisent les députés qui ont émis des réserves, considérant que «cela ne fera qu’accélérer l’érosion des réserves de change, ajoutant en outre que les taxes prévues par le projet de loi donneront lieu à des prix inimaginables».
Samira Takharboucht