Ces Algériens que nous n’oublierons jamais

Football et mort subite

Les responsables du football algérien sont frappés d’amnésie. Ils oublient vite les êtres chers qui sont décédés sur un terrain de football ou en dehors : à l’image de Moha Hamid, Belmiloudi, Amrous Tayeb, Guesba, Gasmi Nabil, Hammouche…

Un petit retour en arrière pour que la nouvelle génération découvre quelques noms qui ont fait le football hier, et qui ont laissé leur peau dans un stade…

Moha l’assurance

Qui était Moha Hamid, cet excellent arrière central du grand Chabab Belouizdad qui était le digne successeur de Mustapha Zitouni (le meilleur défenseur de tous les temps). Intraitable sur les balles hautes, ses constructions étaient très efficaces. Hamid Moha était d’un calme olympien qui savait sortir sa défense des situations les plus chaudes alors qu’il n’était âgé d’à peine de 19 printemps. Lucien Leduc, le coach français, va le chercher pour lui confier les rênes de la défense des Verts. Il le pose en concurrent de Hadefi Miloud, le grand stratège oranais. Mais comme la vie aime bien nous jouer des tours, au moment où l’on s’y attend le moins, Hamid Moha effectue son dernier match en équipe nationale alors qu’il allait gaiement sur ses 21 ans, avant de nous quitter à la suite d’un malaise cardiaque. L’Algérie venait de perdre, l’un de ses plus sûrs espoirs. Il a donné sa vie pour le football algérien. Il décède en 1971. La génération actuelle ne connaît rien de Moha Hamid : il aurait fallu que le grand CRB raconte son histoire et pourquoi pas lui dédier, à titre posthume, une épitaphe devant le stade du 20-Août pour se rappeler de lui.

Benmiloudi, la perle qui n’a pas terminé sa montée

Il ne faut pas oublier aussi Benmiloudi Hocine, la perle montante dont l’équipe nationale algérienne semblait avoir trouvé l’avant centre qui lui faisait défaut lorsque la mort est venue brusquement le faucher en pleine jeunesse, Hocine au cours d’une rencontre de football qui opposait son équipe de football le CRB à l’USM Aïn Beïda au stade du 20-Août 1955, il fut pris d’un malaise cardiaque en plein match télévisé, c’était la destinée certes mais le Chabab, là aussi, aurait dû écrire son histoire afin que nul n’oublie.

Tayeb Amrous, il est parti trop jeune

Le MC Alger, lui aussi, a failli à sa noble tâche en oubliant le regretté Tayeb Amrous qui est mort à l’âge de 18 ans dans un stade football en disputant une balle en air avec l’avant centre du Hamra Annaba. Comment deux avants centres puissent se retrouver côte-à-côte se disputant une balle en l’air de la tête. Tayeb est tombé raide mort sur la pelouse en tuf, c’était la consternation. Il fut enterré au cimetière de Lala Aïcha de Bordj-Menaïel, sa ville natale, mais le plus désolant est le fait que personne ne parle de lui, mort et enterré. C’est le total oubli : les anciens joueurs, les dirigeants sont amnésiques. Pourquoi le Doyen des clubs d’Algérie n’a-t-il jamais pensé à baptiser quelque chose en son nom ?

L’inoubliable Gasmi

La seule formation de football qui n’a jamais oublié son défunt joueur du nom de Gasmi Hocine, c’est bien la JS Kabylie. C’est le message que les Genêts ont exprimé ce jeudi 21 mai à l’occasion du 20e anniversaire de la disparition tragique du jeune attaquant de la JSK, happé par la mort. Ayant subi un traumatisme crânien sur le tartan du stade du 1er-Novembre de Tizi-Ouzou au cours d’une rencontre de championnat d’Algérie de football à la suite de son dernier but marqué contre l’USM Annaba alors qu’il n’avait que les 26 printemps. Natif des Eucalyptus dans la banlieue d’Alger, il avait porté les couleurs de l’USM El Harrach.

Hamouche, une carrière inachevée

Mohamed Hamouche, l’ex-gardien de but de l’USM Blida, devenu entraîneur des gardiens, s’est éteint à l’âge de 46 ans dans un lieu qu’il affectionne le plus, un stade de football, le stade du 20-Août 1955 plus connu par les Annassers. Hamouche Mohamed, le gardien atypique formé à l’école de l’USM Alger, a porté les couleurs de Blida et de l’O Médéa et terminera sa carrière au NA Hussein Dey qu’il fera accéder au palier supérieur avec son coach et ami Chabane Merzekane. Il nous a quitté subitement alors qu’il accomplissait son travail d’échauffement de son gardien Kermiche, subitement il s’écroule en arrière, sa tête touche lourdement le sol, inanimé. Il avait avalé sa langue. Evacué d’urgence à l’hôpital Mustapha-Pacha, il décédera en salle de réanimation. Le match PAC-WAB est arrêté. Lui aussi a droit à de la gratitude de ce qu’il a donné au football algérien. Benazzouz Moussa, milieu du terrain du PAC, est lui décédé suite à des complications cardiaques le 14 novembre 2002. Il rendit l’âme aux urgences de l’hôpital de Béni-Messous, victime d’un télescopage avec un joueur adverse. Il a été soigné sur le terrain avant de poursuivre le match, après la rencontre, il ressent des douleurs à la poitrine. Il succomba d’une crise cardiaque. Ce sont des joueurs de football qui font partie de l’histoire footballistique du football algérien, au même titre que les Guesba et autres. Leur seul reproche est d’avoir aimé le football.

La mort subite, une mort brutale
Moha l’assurance Ils ont été sujets à ce que l’on appelle la mort subite, une mort qui ne pardonne pas, et pour cela, les médecins spécialistes définissent la mort subite comme une «mort brutale d’origine cardiaque chez un sujet en pleine santé apparente». Dans notre sport en général et dans le football en particulier, force est de constater que rien n’a été entrepris pour prévenir cette pathologie. Un spécialiste de la traumatologie du sport définit cet accident comme suit «la mort subite du sportif est une mort naturelle, non traumatique, inattendue, survenant au cours ou jusqu’à une heure après la pratique d’un sport». Cependant la «tare» est souvent à détecter en aval. Il est, en effet, prouvé que ce sont les cardiaques qui sont exclusivement sujets à un accident de ce type et c’est là le drame puisqu’il n’y a jamais de dépistage pour prendre les dispositions qui s’imposent. En clair, les maladies cardiaques sont souvent méconnues chez les sportifs, or les spécialistes expliquent que «lorsqu’une maladie cardiaque est méconnue chez un sportif, la mort subite peut en être le premier et dernier symptôme : c’est-à-dire que le moment de détection et de la confirmation de la maladie se confond fatalement et dramatiquement avec l’irréparable, à savoir la mort subite. De là, apparaît le rôle très important de l’électrocardiogramme (ECG) comme véritable outil de dépistage et d’orientation. Des professions spécifiques (pilotes, pompiers, militaires, sportifs, conducteurs d’engins…) devraient être soumis au préalable du recrutement ou d’autorisation d’exercice à un interrogatoire, un examen clinique et surtout un ECG. Pour prévenir le risque des éventuelles maladies cardiaques (les spécialistes en ont dénombré plus de 24), entraînant directement la mort subite. Ceux qui exercent ou sont appelés à exercer dans les métiers à risques ci-dessus devraient être systématiquement soumis à des ECG répétés afin d’éliminer chez «ces populations à risques de mort subite» tout drame futur. Dans leurs études, les spécialistes de la médecine du sport prennent souvent comme cas clinique, les cas d’un footballeur de 18 ans, d’un cycliste de 41 ans et d’un gymnaste de 10 ans ayant présenté des maladies lors d’exercices physiques. La règle à adopter est de soumettre à consultation tout malaise à l’effort aussi minime soit-il. Par malaise, il faut entendre le vertige, la douleur thoracique, la perte de connaissance, et toute espèce de gêne respiratoire, vue brouillée ou sensation de fourmillement répété, de jambes «plombées» ou encore de crampes injustifiées et sans corrélation réelle avec l’effort. Les spécialistes vont encore plus loin en préconisant une cessation de tout entraînement pour le sportif qui présente une maladie virale telle que la grippe. Cette cessation doit aller jusqu’à 5 jours après la disparition des signes de la maladie. L’ECG étant le passage obligé, rassurant et suffisant pour éliminer tous types de doute, il est recommandé d’en pratiquer deux types : l’ECG de repos et l’ECG d’effort. L’ECG de repos renseigne sur les cas de surmenage cardiaque ou de surentraînement. Un cœur surmené ou un sportif surentraîné peuvent être des cas de mort subite si une pathologie cardiaque antérieurement méconnue existe. De toute évidence, la fatigue est une manifestation normale chez un sportif surentraîné. Normale au sens évidence, mais pas du tout conseillée : l’ECG, un interrogatoire minutieux et un examen clinique sont des compléments recommandés. Il s’agit de rechercher les facteurs de risques personnels tels que le tabagisme, le cholestérol élevé ou encore les antécédents familiaux. L’alimentation du sportif est, faut-il, le rappeler d’une importance cruciale pour sa santé tout comme pour son rendement compétitif. Quant à l’ECG d’effort, il doit intervenir dans les sports de compétition.
Kouider Djouab