L’énergie et l’agriculture seront-ils le charbon et l’acier de l’Union du Maghreb Arabe ?

Depuis sa création en 1989, l’Union du Maghreb arabe reste une instance symbolique sans pouvoir se concrétiser en une « communauté économique et politique ». L’union douanière prévue en 1995 et le marché unique promis en 2000 n’ont pas pu voir le jour. La volonté de relancer cette union reste très timide, voire 

inexistante.

De ce fait, les peuples des pays maghrébins se voient désespérés devant l’échec de la réalisation de leur espérance et aspiration à l’unité. Vue l’état d’urgence sanitaires actuel à cause de la pandémie de la Covid-19, qui a causé une sérieuse crise économique mondiale et qui aura des répercussions inédites sur le court et le moyen termes, l’association Le Grand Maghreb, par cet essai, entend relancer le débat sur ce projet qui tient à cœur à la communauté franco-maghrébine. Et espère que ça va atteindre les dirigeants de ces pays.

Les objectifs de l’UMA

Les objectifs de la création de l’UMA sont notés dans le traité du Marrakech du 17 février 1989. Cette intégration concerne tous les domaines politique, économique, culturel, social et sécuritaire, ainsi que les relations avec les pays tiers. L’unité religieuse, linguistique et historique formait également un précurseur de cette union.

Intérêt économique

Il y a un consensus entre tous les spécialistes de la région du Maghreb que la constitution du marché unique de l’UMA pour une unité douanière entre tous les Etats membres permettra un développement économique important. Cette unité repose sur les quatre libertés fondamentales : la libre circulation des biens et des services, des capitaux et des personnes. L’intégration rendrait la région plus attractive pour les entreprises et les investisseurs étrangers, réduirait le coût du commerce infrarégional, du capital et des mouvements de main-d’œuvre, et accroîtrait l’efficience des dépenses publiques. Elle conférerait aussi au Maghreb plus de résilience face aux chocs économiques et à la volatilité des marchés. À l’état actuel, les échanges commerciaux entre les pays du Maghreb ne dépassent pas les 5 % (Taieb Baccouche, SG de l’UMA, 2018). Le poids des États du Maghreb dans le commerce mondial, modeste en-soi, a passé d’environ 2 % au début des années 1980 à moins de 0,60 % aujourd’hui. Le taux de chômage est resté depuis longtemps très élevé à cause d’une croissance économique faible. Il est actuellement de l’ordre de 11%, 24% chez les jeunes et 14% pour les femmes. La pauvreté et les inégalités n’ont guère baissé depuis les révoltes du monde arabe en 2011. Une intégration économique entre les pays du Maghreb créerait un marché de cent millions de personnes avec un revenu moyen de 12.000 dollars (environ 10.000 euros) en parité de pouvoir d’achat. Le gain de croissance découlant de l’intégration commerciale sur la période 2018-2023 est de 1.6% en Algérie, 3.9% en Libye, 3.4% en Tunisie, 4.1% au Maroc et 5.5% en Mauritanie selon le FMI. Le gain en productivité par tête, qui reste très bas par rapport au pays asiatiques, est également à creusé en modernisant structurellement les économies maghrébines. Ces estimations des scientifiques sont largement basées sur l’état actuel des choses. La création de grands projets communs entre les pays du Maghreb, proposé ci-dessous, pourrait amplifier les résultats économiques attendus. Pendant la période 1958-1970, les effets du démantèlement douanières et des restrictions quantitatives des échanges entre les pays de la CEE (communauté économique européenne) ont eu des résultats spectaculaires en multipliant par six le commerce intracommunautaire, par trois les échanges avec les pays tiers et augmenté le PNB de 70%. En réalisant les projets proposés ci-dessous, qui vont transformer le paysage maghrébin, les résultats espérés d’une intégration économique maghrébine pourrait être autant spectaculaire que celle de la CEE des années soixante. L’intégration va faire du Maghreb une plaque tournante du commerce et de l’investissement entre l’Afrique subsaharienne et l’Europe et renforcerait la capacité de négociation de la région dans des domaines d’intérêt commun.

Les obstacles devant le fonctionnement de l’UMA

Malgré tout ce potentiel économique et diplomatique à exploiter, les pays maghrébins n’arrivent toujours pas à trouver un terrain d’entente permettant une réelle restauration de cette de l’UMA. Plusieurs hypothèses essayent d’expliquer les obstacles devant une réelle coopération maghrébine. L’absence d’une volonté politique des dirigeants de la région en vue de lever le présumé blocus qui contraignent le projet maghrébin est soulevée en étant l’une des principale cause de dysfonctionnement de l’UMA. « Les gouvernements du Maghreb ont souvent fait prévaloir des logiques nationalistes sur l’intégration régionale qui ne répondait ni à un besoin politique pressant, ni à une contrainte économique subie» (Abdelwahab Biad, 2013). Les pays de l’UMA privilégient de tisser des relations bilatérales euro-méditerranéennes verticales Nord-Sud avec l’Union Européenne (UE) et ses pays membre, sur les échanges intermaghrébins (relation horizontale Sud-Sud). En 2011, le Maroc et l’Union européenne (UE) ont démarré des négociations sur un accord de libre-échange complet et approfondi (ALECA). Des accords d’association existent déjà depuis 2000. Un accord d’association entre la Tunisie et l’UE avait été signé en 1995 et entré en vigueur en 1998, et des négociations pour un futur ALECA entre les deux parties été lancées le 13 octobre 2015. Le contentieux du Sahara occidental constitue un vrai obstacle politique contre l’intégration de la région Maghrébine selon certains, faux selon d’autres. L’antagonisme Algérie-Maroc à ce sujet a de nombreuses conséquences économiques, dont la fermeture de la frontière commune depuis 1994. Des experts ont relevé plusieurs contraintes d’ordre économique et technique qui forment un obstacle devant l’intégration de la région du Maghreb. « Au niveau macroéconomique, un environnement peu incitatif, une insuffisance des infrastructures de base, des coûts élevés des facteurs de production, au niveau microéconomique, une absence de système d’information efficace et une insuffisance des capacités de gestion des entreprises, au niveau méso-économique, un accès au crédit bancaire difficile, surtout pour l’investissement, un dispositif d’appui aux entreprises peu efficace, comprenant des moyens très dérisoires » (Mebtoul, 2011). Des droits et taxes au commerce élevées, d’insuffisance des infrastructures de transports interrégional, et des législations des inadaptées et peu harmonisées constitue également des réels obstacles devant l’unité. La divergence des visions et positions diplomatiques et sécuritaires. À commencer par la Guerre du Golfe en 1992, passant le problème du terrorisme au sahel en terminant par les révoltes populaires dans les pays arabes.

La relance

Malgré la pertinence et l’importance de ces contraintes soulevées par les spécialistes, l’association ALGM a une vision plus réaliste et pense que le dysfonctionnement de l’UMA n’est que les résultats d’une stratégie inefficace et très optimiste. Il est vrai que la situation du Sahara occidental représente, malheureusement, un mal qui divise la région depuis le milieu des années soixante-dix et que tous les maghrébins espèrent y trouver une solution durable. Cependant, ce problème reste de l’ordre politique et ne peut empêcher une intégration économique et sociale de la région.

Le fait de le soulever comme étant un obstacle devant l’unité maghrébine est un faux prétexte que l’on doit éviter. Prétendre que ce problème contraigne toute unité Magrébine mettra en difficulté économique et sécuritaire tous les pays maghrébins. Attendu que les échanges sécuritaires et militaires sont très réduit, voire inexistant, entre la plupart des états membre de l’UMA. Il faudra donc rétablir un climat de confiance, surtout entre les deux plus grands membres de cette Union, l’Algérie et le Maroc. La situation d’insécurité, voire de guerre, en Libye, pays membre de l’UMA, sans aucune intervention politique ou militaire coordonnées entre les pays maghrébins constitue un échec fulgurant et mettra en danger les intérêts économiques et politiques de toute la région. La menace terroriste au Sahel demande une vraie coopération sécuritaire et militaire entre les pays de l’UMA. La situation sécuritaire mondiale et la constitution des alliances militaires dans plusieurs régions du monde, menace d’un éclatement des confits militaires, voir des guerres, dans un avenir très proche.

Un Maghreb désuni sera très impacté par ces menace militaires, autant sur le plan sécuritaire que sur le plan économique voir alimentaire. Il est vraie que les priorités économiques individuelles, historiques et actuelles, des Etats membres de l’UMA sont assez divergents et priorisent les échanges économiques et diplomatiques avec des pays tiers, et plus particulièrement avec l’UE. Malgré la prise de conscience de l’importance économique et politique d’une intégration maghrébine, les décideurs politiques ne semblent pas vouloir concrétiser ce projet d’union. La principale cause, empêchant une réelle intégration maghrébine, est le manque d’une approche ou d’une stratégie réaliste et faisable. En effet, les objectifs du traité du Marrakech sont aussi variés qu’il couvre tous les domaines sans mettre en place une période de transition avec un certain nombre d’objectifs – très limités – afin qu’il puisse être accomplie.

L’union maghrébine ne pourra pas être forcée malgré les nombreux points communs culturels, sociaux et religieux qui lient nos peuples. Pour cela, ALGM présente les propositions suivantes indispensable pour une réelle intégration économique et sociale du Maghreb. 1.L’unité concrète de l’UMA ne pourra pas se concrétiser sans un réel partenariat économique entre les états membres. Nous proposons la création d’une instance supranational qui gèrera certains secteurs économiques commun à tous les pays maghrébin à l’instar de la Communauté européenne du charbon et de l’acier (CECA) crée en 1951 qui était le précurseur de la création de l’union européenne (UE). 2.Trois secteurs sont à gérer par instance. Premièrement, le secteur de transport intermaghrébin. Cette instance doit gérer la création et la maintenance d’un réseau de transport (routière, train et TGV) tout en terminant les projets déjà existant (Ex :

L’autoroute transmaghrébine, La Route transsaharienne) et de lancer de nouveau projets. Deuxièmement, le secteur de l’énergie. Cette instance doit gérer un projet d’interconnexion des réseaux électriques intermaghrébins et créer des centrale de production de l’énergie solaire et éolienne (et autres). Ces réseaux seront utilisés également pour l’exportation de l’électricité vers l’Europe et l’Afrique subsaharienne. Troisièmement, le secteur de l’agriculture. Une gestion commune de certain projets d’agriculture permettrons une autosuffisance des tous les pays maghrébins en plusieurs denrées alimentaires. Et à terme, ça va transformer la région en un exportateur agricole mondial important et incontournable. 3.Certaines zones, très vaste, qui relient les pays maghrébins sont sous-peuplées (voir non-peuplées), ce qui constitue un obstacle devant tout échange entre certains pays maghrébins et limite les chances d’une union maghrébines effective.

Ces zones sont situées notamment au sud de l’Algérie, le nord de la Mauritanie, le sud et le sud-ouest de la Libye. Les trois projets cités ci-dessus, doivent concentrer une grande partie des leurs projets dans cette zone déserté. Ainsi, à terme, des petites et moyennes villes verront le jour dans ces zones ce qui va booster la mobilité et les échange économique intermaghrébins et entre le Maghreb et l’Afrique. 4.L’ouverture des frontières et l’annulation des visas imposés entre certains pays de l’UMA pour une libre circulation des personnes sont des mesures urgentes à entreprendre. 5.Le marché unique, l’annulation des barrières douanières et l’harmonisation des règlementations ne représentent pas une priorité en vue d’une union maghrébine effective. Ces sujets peuvent être traités posément sur le long terme vu leurs complexités et technicités.