L’Etat pêche dans un excès de pessimisme conjoncturel

Le PLF 2021 à la croisée des prévisions

Le marché économique mondial s’essouffle. Financièrement la situation devient compliquée pour tous les pays du monde. L’Algérie n’échappe pas à cette exception dont un rebond de croissance repose sur les réformes financières attendues dans un contexte macro-économique soutenable et une inflation relativement stable.

Ce cadrage semble difficile à réaliser à priori en raison de la baisse catastrophique des réserves de change «évaluées à 45 milliards de dollars), la dévaluation de 5% de la valeur du Dinars et la hausse des déficits publics et de la dette intérieure». Le ralentissement de la production industrielle et le repli des recettes fiscales conduisent le pays à une «relative dérive budgétaire», ce qui ne semble pas le cas étant donné que l’Etat table sur un cadrage budgétaire optimiste. Toutefois, certaines prévisions pessimistes augurent un mauvais présage pour l’année 2021, en absence de perspectives et d’un véritable débat sur la politique monétaire. Cette impasse financière impose un ajustement des dépenses et se concentrer sur la correction des fluctuations cycliques de l’activité économique dont l’objectif d’atteindre une certaine stabilité des prix à la consommation, ce qui risque d’être compliqué à cause de l’inflation provoquée par la chute de la valeur du Dinar, sachant que la majeure partie des produits consommés par les Algériens sont importés. En réponse aux enjeux soulevés à l’occasion de la crise sanitaire inédite et économique, l’Algérie a opté pour la prudence dans la définition de ses objectifs de croissance, notamment, variables aussi dits aléatoires tel que le taux du chômage et celui du Produit intérieur brut (PIB). Ces deux indices sont liés à leur compatibilité avec le marché du travail et celui de l’effort de production. Ce dernier demeure insignifiant jusqu’à aujourd’hui. La situation financière difficile du pays ces dernières années, particulièrement cette année, a soulevé des interrogations quant à la pérennité des décisions ou approches du gouvernement pour soutenir la politique des finances publiques gravement affectée par la conjoncture actuelle. Les dépenses imprévues n’ont fait qu’aggraver le déficit budgétaire et épuiser dans les économies du pays qui s’avèrent impuissantes face à l’accélération de la chute des indices macro-économiques engendrant un véritable malaise social. Pour amortir cette onde de choc, l’Etat tente d’installer une certaine stabilité financière indispensable autant que la stabilité monétaire domestique, dans un marché libre. Il compte mettre en place un nouveau régime fiscal et financier en accordant plus de crédibilité à ses actions instrumentales. Certaines actions sont déjà mises en place telles que le soutien des établissements de crédit, des sociétés d’investissement, les start-ups, à capital variable, créations de fonds communs et la modernisation des réseaux bancaires et postaux… Il vise, également, à diversifier son économie et s’affranchir des hydrocarbures afin d’avoir une meilleure visibilité sur le marché de change international et surtout trouver des alternatives de financements des caisses de l’Etat, en déprime. Le PLF 2021 prévoit «un prix de référence du baril de pétrole brut à 40 dollars pour la période 2021-2023», avec la «stabilité du prix de marché, mais avec un écart de cinq (+5) dollars le baril par rapport au prix du pétrole qui est attendu à 45 dollars au cours de la même période». Pour rappel, l’Algérie a revu à la baisse son prix référentiel du baril de pétrole à 30 dollars dans la LFC 2020, quant le prix de l’or noir est passé sous la barre des 10 dollars. Certes, il mise sur la prudence, mais aussi prend le risque dans un contexte économique mondial incertain. La base du calcul de la prochaine loi de Finances est préétablie à 40 dollars, en espérant la stabilisation des cours du pétrole à 45 dollars avec la dissipation progressive de la pandémie et le retour de l’activité économique mondiale. Dans ce contexte, «il est attendu à ce que les recettes pétrolières au cours de la période 2021-2023 atteindront 23,21 milliards de dollars en 2021, 28,68 milliards de dollars en 2022 et 26,45 milliards de dollars en 2023 sur la base de 45 dollars le baril comme prix de marché du baril de pétrole brut «Sahara Blend» pendant la période de prévision», a indiqué le ministre des Finances, Aymen Benabderrahmane. Des estimations qui laissent une faible marge de manœuvre à l’Etat qui devra prendre des risques pour exécuter les réformes financières et économiques permettant d’atteindre «à la croissance économique de retrouver une reprise de 3,98% en 2021 après avoir diminué de 4,6% selon les estimations de la clôture 2020», a-t-il plaidé. Certes, il serait difficile de stimuler les effets exogènes et endogènes de la crise sanitaire et financière sur l’économie déjà fragile du pays. Pour ce faire, il faudrait accélérer le rythme de travail, de production et surtout de finance inclusive pour soutenir les opérateurs économiques et maintenir la stabilité sociale.
Samira Takharboucht