L’Opep+ à la croisée des chemins

La 180ème réunion ministérielle de l’Opep reportée d’un jour

Rien n’est encore gagné. Les discussions entre les 13 pays membres de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) et ses dix alliés dont la Russie sont reportées d’un jour, alors qu’ils devaient statuer sur la nouvelle stratégie de production du marché pétrolier et choisir entre une prolongation des mesures d’extraction en janvier et une augmentation progressive de l’offre pour relancer le marché d’investissement pétrolier sclérosé par la crise sanitaire du Covid-19.

Aucun compromis n’a été encore conclu. Le marché reste hésitant. Les prix évoluent depuis deux jours en ordre dispersé et les investisseurs sont prudents et attendent l’issue de cette réunion décisive. Le doute plane encore sur le sort de l’Accord Opep+, conclu le 12 avril dernier. La Russie à la tête des alliés de l’Opep semble indécise et peu optimiste quant à la reconduction dudit Accord, selon le porte-parole du Kremlin, Dimitri Peskov, qui a évoqué l’existence de divergences entre la Russie et l’Opep. Alors que l’Arabie saoudite, l’adversaire historique de la Russie s’est dit favorable à une prolongation des plafonds actuels de production, selon les informations relayées par leurs médias locaux. Tout comme l’Algérie qui a plaidé pour le maintien du plafonnement de la production durant le premier semestre 2021. «Les pays membre de l’Organisation ont approuvé à l’unanimité la prolongation, jusqu’à fin mars 2021, du plafonnement de la production à 7,7 millions barils/jour», a déclaré, le ministre de l’Energie, Abdelmadjid Attar, également président de la 180ème réunion ministérielle de l’Opep, mettant en garde contre «la non poursuite des efforts consentis depuis 7 mois par l’Opep», qui pourrait, selon lui, «constituer une menace pour le marché pétrolier».
Cette décision qui attend l’approbation des partenaires de l’Opep signerait, peut être, une dernière ou ultime performance de la «Déclaration de coopération» conclue entre les 23 pays producteurs de pétrole, dans l’objectif de réguler les prix du pétrole et redresser le marché des investissements pétroliers plombé par la double crise sanitaire et économique qui secoue le monde depuis presqu’une année. Maintenant, il reste à convaincre tous les participants. A moyen terme, la reconduction de l’Accord Opep+ accorderait une importante marge de manœuvre aux pays producteurs de l’or noir impactés par la crise du Covid-19 pour reprendre leur souffle. Une bouffée d’oxygène qui n’est pas, toutefois, sans risque car l’évolution des cours du pétrole est tributaire de la fiabilité des vaccins anti-Covid et surtout de la relance de l’activité économique mondiale.
Le marché des hydrocarbures reste déprimé, en dépit de la reprise des prix du pétrole qui étaient au plus haut niveau durant le mois de novembre, grâce aux progrès réalisés par les laboratoires pharmaceutiques qui ont mis au point de vaccins et des résultats de l’élection américaine. Influencé par ces bouleversements, le marché pétrolier affiche depuis des semaines des signes positifs, notamment, avec la reprise accélérée de l’industrie manufacturière en Chine. Ces facteurs sont à l’origine du rebond des cours du pétrole qui ont grimpé sur l’ensemble du mois de novembre. Le Brent et WTI a augmenté de 27 % au mois de novembre.
Depuis quelques jours, les cours ont baissé à l’issue des deux journées de la réunion cruciale des pays membres de l’Opep+ qui se sont rencontrés par visioconférence afin d’examiner l’évolution du marché pétrolier avant de décider de l’avenir de l’Accord Opep+ qui a contribué à équilibré les cours de l’or noir et absorber le surplus de la production brute américaine, mais aussi a réconcilier les deux rivaux historiques (Russie et l’Arabie saoudite). Malgré le brusque coup de frein enregistré ces deux derniers jours, les investisseurs et les producteurs pétroliers semblent encore plus prudents que lors des précédentes réunions ministérielles de l’Opep, sans doute en raison des tensions que subissent le marché des matières premières et le repli des marchés financiers et boursiers.
La volatilité des prix du pétrole ces jours-ci s’explique, également, par la réticence de la plupart des observateurs qui ont plaidé pour un report de trois, voire six mois, en raison de la seconde vague de la crise sanitaire n’ayant pas été anticipée à temps par les pays producteurs du pétrole. Les pays membres de l’Opep dont l’Algérie ont approuvé le maintien du plafonnement des coupes de production de pétrole, et tentent de convaincre leurs alliés de valider ce compromis. Sans leur forcer la main, en raison des tensions antérieures entre les deux grands producteurs rivaux, Moscou et Ryad), qui ont d’ailleurs envoyé ces dernières semaines des signaux en faveur du report de cette décision de trois à six mois. «Les pays membres pourront, en cas d’adoption du prolongement, tenir une réunion d’urgence en mars prochain en vue de l’application immédiate du plafonnement convenu dans l’accord portant réduction de la production, soit à 5,8 millions b/j», a-t-il affirmé. La décision finale sera prise aujourd’hui au cours du deuxième jour de la réunion ministérielle de l’Opep qui sera, également, sanctionnée par une série de recommandations.
Samira Takharboucht