Les révélations d’espionnage du programme NSO–Pegasus posent la problématique de la sécurité nationale et de la maîtrise des nouvelles technologies

Cyber-sécurité

La maîtrise des nouvelles technologies reposant sur le savoir est le défi principal du XXIe siècle, engageant la sécurité mondiale et toute inadaptation à ces mutations isolerait encore plus le pays.

L’organisation Forbidden Stories et 17 rédactions viennent de révéler un important scandale d’espionnage qui touche tant la sécurité des Nations que la vie privée des citoyens initié par le Maroc. Mais si les experts militaires s’accordent sur le fait que l’espionnage a existé depuis que le monde est monde, mais aujourd’hui plus sophistiqué, avec l’avènement des cyber-attaques, appartenant à chaque nation d’utiliser des moyens plus sophistiqués pour se protéger, le problème qui se pose est ce que le Maroc a-t-il les moyens scientifiques d’opérer une telle action sans complicité. Le programme phare de NSO nommé Pegasus, un logiciel d’origine israélienne surnommé «cheval de Troie», a permis de fouiller dans les données (calendriers, photos, contacts, messageries, appels enregistrés, coordonnées GPS) des Smartphones, iPhone comme Android, infectés, mais aussi de contrôler à distance la caméra et les micros intégrés à l’appareil.

Cela donne la possibilité d’écouter des conversations dans une pièce alors que le téléphone apparaît inactif. Ce logiciel en est à sa troisième version. Dans les premières moutures, la victime devait cliquer sur un lien pour charger le virus. Mais, depuis au moins deux ans, Pegasus est devenu une technologie dite «zéro clic » où la victime reçoit ce qui ressemble à un appel vidéo qui suffit à infecter le téléphone dès la première sonnerie, même si elle ne répond pas. Selon Forbidden Stories, la réception d’un «iMessage», la messagerie d’Apple, ou d’un SMS infecté servirait de viatique pour prendre le contrôle de l’appareil. C’est un puissant logiciel qui au départ devait contrecarrer les actions terroristes mais, seules des enquêtes précises en cours le détermineront, qui aurait été utilisé pour espionner le compte d’une dizaine d’Etats, et une liste de plus de 50 000 numéros de téléphone de personnalités diverses de par le monde dont environ 6 000 personnalités pour l’Algérie.

Cependant les nouvelles technologies ne concernent pas seulement les écoutes. Les drones sans pilotes commencent à remplacer l’aviation militaire classique pouvant cibler avec précision tout adversaire à partir de centres informatiques sophistiqués à des milliers de kilomètres. Les satellites remplissant l’atmosphère, permettent d’espionner tout pays, de détecter le mouvement des troupes et la diffusion d’images de toute la planète. Le contrôle de l’information grâce à l’informatisation permet le développement des sites d’information, impliquant une adaptation des journaux papier, une nouvelle organisation des entreprises et administrations en réseaux, loin de l’organisation hiérarchique dépassée, l’interconnexion bancaire et éclectique, pouvant bloquer tout pays dans ses transactions financières et la panne des réseaux peut plonger tout pays dans les ténèbres. L’utilisation de Facebook et Twitter par la diffusion d’informations parfois non fondées où faute de transparence, la rumeur dévastatrice supplante l’information officielle déficiente.

Face à cette situation ayant des impacts géostratégiques, économiques et sécuritaires, où les relations diplomatiques de chefs d’Etat à Etat ont de plus en plus peu d’impacts, étant supplantés par des réseaux décentralisés, l’Etat major de l’ANP à travers les dernières éditions El-Djeich tire la sonnette d’alarme afin que la majorité des responsables des institutions stratégiques en Algérie en déphasage par rapport aux nouvelles réalités tant internes que mondiales, s’adaptent en urgence, nécessitant un important investissement dans le savoir. C’est que la nouvelle révolution mondiale du numérique a un impact sur le comportement des citoyens, sur la gestion des institutions et des entreprises et d’une manière générale sur la gouvernance et sur notre nouveau mode de vie. Politiques, militaires, entrepreneurs, citoyens, nous vivons tous aujourd’hui dans une société de la communication électronique, plurielle et immédiate qui nous contraint à prendre des décisions en temps réel.

La naissance des NTIC est due notamment à la convergence de l’informatique, des télécommunications et de l’audiovisuel. Le développement d’Internet à haut débit, la démocratisation de l’ordinateur et des nouvelles technologies découlent d’une baisse des tarifs proposés par les fournisseurs d’accès et d’une demande de plus en plus présente de la clientèle. Le boum des blogs et des messageries électroniques donne aux TIC une place de plus en plus vaste dans notre société. Cette interaction de l’électronique et de l’informatique explique que les applications des NTIC puissent répondre aux besoins aussi bien des entreprises et de l’Etat que des ménages et des individus. Désormais soumises aux mêmes lois du marché que n’importe quelle autre activité de production marchande, les NTIC constituent, en outre, un secteur où la concurrence se joue directement à l’échelle mondiale.

La globalisation des entreprises, des marchés et des circuits de la finance n’a pas seulement impliqué un remodelage des structures économiques et des flux d’échange, elle a aussi conduit à la professionnalisation de la communication et de l’information, ainsi qu’à une intégration de plus en plus poussée des phases de la conception, de la création et de la consommation des produits, parallèlement à la fusion de sphères d’activités jadis séparées, voire opposées. Plus qu’une ouverture vers le grand public les TIC révolutionnent l’organisation interne de l’entreprise, les logiciels de gestion appelés les ERP (Entreprise Ressource Planning) gèrent différentes tâches comme les stocks ou la trésorerie, le travail collaboratif est simplifié grâce à l’utilisation de l’intranet et de la messagerie, le système «Wireless» ou «sans fil» maintient un lien permanent avec des collaborateurs, tout comme la vidéoconférence, tout cela générant un meilleur partage ainsi qu’une meilleure circulation de l’information interne.

Ainsi, notre univers est devenu une grande maison de verre, l’infrastructure de l’Internet se répandant aujourd’hui autour du monde pour créer un large réseau mondial et ce grâce à l’informatique qui permet aujourd’hui de numériser les informations et de gérer de nouveaux systèmes. L’intégration des télécommunications, de l’informatique et de l’audiovisuel a donné naissance à la Société de l’information qui fait l’objet d’une attention particulière de la part des Etats et des organisations internationales. Cet intérêt s’est trouvé accru depuis plus d’une décennie en raison des retombées socio-économiques et culturelles des nouvelles technologies de l’information de la communication (voir l’American Herald Tribune du 11 août 2018 (USA) Dr Abderrahmane Mebtoul : «Algeria Still Faces Significant Challenges» et trois parties dans le site international Africapresse Paris 8/9/10 août 2018 sur les défis de l’Algérie 2018/2020/2030 Pr A. Mebtoul (1/3) «Le développement de Algérie implique la réforme du système politique» b-Pr A. Mebtoul (2/3) : «Il est urgent d’adapter nos partis politiques algériens, pour la majorité liés à des intérêts de rente» -Pr A. Mebtoul (3/3) : «Pas de développement pour l’Algérie sans vison stratégique de la transition à une économie hors hydrocarbures»).

Abderrahmane Mebtoul Professeur des Universités