Le remake Macron vs Le Pen se rejoue de peu, malgré le score historique de Mélenchon

Premier tour de la présidentielle en France

Même s’il a échoué (de justesse) à déjouer le plan diabolique du système et à faire mentir les prophéties de ses nombreux oracles qui, des mois durant, à grand renfort de sondages tendancieux, n’ont cessé de pronostiquer un second tour de la présidentielle aux airs de mauvais remake, Jean-Luc Mélenchon peut toutefois s’enorgueillir d’avoir suscité un fort engouement électoral, des couches populaires et de la jeunesse, autour de sa candidature.

Si l’espoir de le voir ferrailler contre Emmanuel Macron, programme à l’appui et avec sa verve intarissable, s’est envolé hier soir, le leader septuagénaire de la France Insoumise peut passer le flambeau la tête haute (si l’on s’en fie à la conclusion de son allocution), conforté par son score historique : 22,2% des suffrages. Il finit de nouveau sur la troisième marche du podium, mais en talonnant cette fois-ci Marine Le Pen et ses 23% de voix obtenues.
Au lendemain de ce premier tour, une amère désillusion prévaut chez toutes celles et ceux qui ont cru, en glissant le bulletin Mélenchon dans l’urne, pouvoir faire un joli pied de nez au conditionnement de masse mis en oeuvre notamment via les médias mainstream (et pas seulement en subliminal…), qui les préparait à une nouvelle Tartufferie politicienne : Macron contre Le Pen.
Loin de faire l’unanimité, le président sortant n’a pas de quoi pavoiser avec ses 27,6% des voix. Il en va de même pour le redoutable trublion de cette présidentielle, Eric Zemmour, qui pensait faire un malheur, et qui, fort heureusement, n’a fédéré autour de son nom que 7% des suffrages.
Il se classe quatrième, loin derrière Jean-Luc Mélenchon et Marine Le Pen, la figure de proue de l’extrême droite française pour laquelle il appelle à voter au second tour, et à plébisciter sa démagogie de caniveau qui dit Oui à la kippa et Non au voile ! Concernant Valérie Pécresse et Anne Hidalgo, les candidates des deux grandes formations politiques (ou du moins ce qu’il en reste…) que furent, pendant des décennies, la droite et la gauche, les Républicains et le Parti socialiste, c’est un camouflet cuisant, une déculottée sévère qui ont sanctionné leur campagne : elles se retrouvent dans le fin fond du classement, presque en lanterne rouge pour Hidalgo, en totalisant respectivement les piètres scores de 4,7% et 1,7% des suffrages.
Yannick Jadot, le candidat EELV, récolte quant à lui 4,7% des voix, un score bien éloigné des prétentions exprimées par les écologistes, en début de campagne.
Si la plupart d’entre eux, hormis le triste sire Zemmour, appellent leurs électeurs à se ranger derrière Macron pour faire barrage à l’extrême droite, Jean-Luc Mélenchon qui, lui aussi, a exhorté vigoureusement à contrer Marine Le Pen, s’est cependant refusé à donner des consignes de vote en faveur du président des riches.
Un oligarque dont le mandat, entre autres souillures, aura été entaché par son mépris du peuple français, la violente répression d’Etat, sans précédent, contre les Gilets Jaunes, sa gestion calamiteuse du covid, le tout émaillé de mensonges éhontés, sans parler de son lien indéfectible avec Israël, au point de proclamer, lors du dernier dîner ultra-communautaire du Crif, par la voix de son Premier ministre, que « Jérusalem est la capitale d’Israël ».
Alors, entre Macron et Le Pen, entre la peste et le choléra, que choisir de faire le 24 avril ? La question, aujourd’hui encore plus qu’hier, se pose cruellement.

On a ce qu’on mérite
L’élection présidentielle annonce des lendemains difficiles et celui du 24 avril sera particulièrement violent. La France se réveillera dans la douleur et il faudra se regarder en face. A moins qu’un sursaut salvateur ne se produise. La France a besoin d’un bouleversement, d’une prise de conscience radicale. L’état de santé démocratique du pays est préoccupant mais, à en croire les sondages, trop peu de Français en mesurent la gravité.
Et pour cause, de savants procédés de soumission et de manipulation des masses sont déployés par le président depuis cinq ans, et ça marche : une foule d’adeptes sensibles aux grosses ficelles médiatiques s’interdit de réaliser qu’un désastre se prépare sous leur nez. Ils persistent à nier le péril démocratique en cours et refusent tout ce qui invalide désormais la légitimité du président-candidat. Ils font prévaloir la logorrhée médiatique, leur dogmatisme ou leur carrière sur la réalité du bilan présidentiel.
Quand on leur présente des faits concrets, ils refusent de les voir, s’enferment dans des calculs politiciens, des attaques personnelles et des raisonnements par étiquettes, déconsidérant les messagers pour s’épargner à bon compte de juger le réel. Ils sont comme le coyote du cartoon qui galope dans le vide sans s’apercevoir que le sol s’est dérobé sous ses pieds. La chute n’est pas moins inévitable.
Aussi, il y a là de quoi être particulièrement inquiet de ces attitudes d’aveuglement volontaire. Inquiet d’abord de voir des Français se résigner et attendre l’homme providentiel qu’on choisira pour eux. Inquiet ensuite d’en voir se défausser, et participer à leur propre naufrage.
Je suis d’autant plus préoccupé que j’ai dressé le bilan social catastrophique d’Emmanuel Macron, et que je tente d’alerter sur ce qui se joue sous leurs yeux. Je montre en effet dans mon livre qu’il est encore temps d’agir contre ce déclin de la démocratie et l’autoritarisme en cours. Par exemple, avec les mesures politiques de bon sens dont je rends compte dans le dernier chapitre, mais surtout par la critique à la racine du macronisme, par le dévoilement de ses ressorts idéologiques, de la teneur de son projet de son échec manifeste.
fait est que toutes ses belles promesses se sont envolées. Les mirages de la novlangue et du jargon techno-managérial se sont évanouis. Ne restent que le vide moral et les scandales. Les milliardaires d’Open-Lux privent nos services publics de milliers de milliards d’euros, mais le scandale continue d’être occulté par des gouvernants complaisants et une machine médiatique complice. Comment admettre qu’une infime part du peuple français « s’exonère, en cachette, des charges communes et de l’intérêt général, alors que dans le même temps, un président arrose de millions des cabinets privés américains explique « qu’il n’y a pas d’argent magique » pour les hôpitaux aux abois, qu’il faut « se serrer la ceinture », et donc, travailler plus longtemps ? A l’heure où les scandales sapent les bases de notre société, l’urgence du moment commande de ne plus faire semblant de rien. Les Français ne sont pas des moins que rien tout juste bons à consommer, à obéir et à se taire. Nombre d’entre eux oppose une résistance farouche à l’apathie que les empires du divertissement s’appliquent à instiller dans leurs esprits. Mais ils doivent encore se libérer d’une triple aliénation : celle des mass-médias qu’il est temps de rendre véritablement indépendants ; celle de l’oligarchie dont il faut révoquer les privilèges ; celle de la croissance aveugle et forcenée qui mine le progrès humain.
Ce n’est qu’à cette condition, en développant une conscience avertie, libre et humaine, qu’ils pourront s’extraire du défaitisme ambiant et regagner leur souveraineté.
Mais pour que s’accomplisse cette espérance, un chemin tortueux reste à parcourir. L’élection présidentielle ouvre la voie et nous place devant nos responsabilités : décider de notre destin collectif ou se complaire dans l’effondrement. Alors, quelle que soit l’issue du scrutin, « on aura ce qu’on mérite ».
Par Hocine Kerzazi