Mère et grand-mère dans la tradition

Parentalité et culture

Commençons par la mère qui a sous sa responsabilité ses petits enfants qui lui demandent au quotidien l’affection dont ils ont besoin pour leur équilibre mental et leur épanouissement. C’est pour cela qu’on dit qu’elle est la gardienne du feu sacré, euphémisme métaphorique qui renvoie à l’idée d’affection maternelle dont le manque se traduit par un désordre psychique. Commençons par la mère qui a sous sa responsabilité ses petits enfants qui lui demandent au quotidien l’affection dont ils ont besoin pour leur équilibre mental et leur épanouissement. C’est pour cela qu’on dit qu’elle est la gardienne du feu sacré, euphémisme métaphorique qui renvoie à l’idée d’affection maternelle dont le manque se traduit par un désordre psychique. C’est lorsque la mère a trop d’enfants et qu’elle ne peut pas satisfaire tout le monde que l’enfant est frustré par ce manque, l’enfant s’abrite alors derrière ses grandes sœurs, s’il en a, ou derrière un autre élément féminin, mais c’est toujours la femme qui prend le relai parce que le père est toujours absent, il est au travail loin de chez lui ou ailleurs. Et si l’enfant a la chance d’avoir une grand-mère disposé à répondre aux caprices des enfants, c’est merveilleux, mais à condition que ne soit pas la belle mère de sa mère. Dans ce cas, cela dépend du caractère de cette grand-mère. Il y a des grands-mères du côté paternelle qui sont de vrais poisons pour leur belle fille, c’est dans la nature des belles mères qui ne supportent pas leur bru. Ceci est dû à la cohabitation dans la tradition. Dans la famille éclatée d’aujourd’hui, il n’y a pas ce phénomène, quand un enfant fonde un foyer, on l’encourage à aller vivre sa vie ailleurs et si on n’a pas besoin de lui, on l’oblige à partir. Il y a des cas où des vieillards obligent leurs fils nouvellement marié à quitter le domicile familial. Un vieux nous a raconté qu’à chacun de ses enfant qui se marie, il exige au préalable un logement où aller vivre dès le jour du mariage, si bien qu’il s’est retrouvé avec sa vieille femme une fois devenu vieux et impotent, il nous a dit qu’il était le plus heureux avec sa vieille femme et sans les enfants, loin des problèmes de belles mères, belles filles. Il faut revenir à la tradition où la belle fille doit apprendre à supporter sa belle mère et lorsqu’il y a plusieurs enfants mariés et vivant sous le même toit, les choses se compliquent et tout dépend de la belle mère et du beau père, s’ils sont encore vivants.

Place de la mère
Elle avait un rôle primordial dans une famille où elle s’occupait de l’essentiel : les enfants, le ménage, la cuisine et souvent lorsqu’il y a un bétail vivrier, c’est également elle qui se chargeait de nourrir les bêtes et de leur nettoyer, c’est la tradition qui le veut ainsi. S’il y avait des belles sœurs, elles se partageaient les taches pour le ménage, la cuisine et le bétail, une des conséquences majeures de l’indivision. Et la fidélité au foyer a été de tout temps quelque chose de sacré, preuve que le mariage était une affaire d’honneur et on ne badine pas avec l’honneur dans la tradition. La mère était omniprésente dans une maison, lieu d’habitation de la famille au sein de laquelle elle avait l’œil partout en tant que gardienne du feu sacré. Ainsi en l’absence du père, la mère imposait un code de bonne conduite pour peu qu’elle avait de l’autorité, imposait l’ordre, si elle n’avait pas la belle mère qui n’admettrait pas que la mère fasse la loi avec tout le monde et surtout avec les enfants et des fois envers son mari si elle trouve la voie libre, des beaux parents sans personnalité et un époux trop laxiste. Une anecdote très ancienne raconte qu’un beau père en colère est allé dire au père de la femme de son fils, devenue insupportable même vis-à-vis de ses beaux parents, par ses impertinences qui frisaient souvent la méchanceté. Le père lui a répondu avec sagesse en lui disant que si sa fille a trouvé des hommes chez toi, c’est normal qu’elle se comporte en femme et si elle a trouvé des femmes, c’est normal qu’elle soit devenue homme.
Le beau ayant vite saisi le message, rebroussa chemin sans commentaire et dès son arrivée chez lui, il a brandi sa canne devant sa belle fille la menaçant de s’en servir si elle ne changeait pas de conduite. Depuis, cette belle fille est devenue un ange qui ne rechignait devant aucune tâche et obéissait du doigt et à l’œil. Belle anecdote ! Ainsi, une mère a le devoir de faire le bonheur de son mari, de ses enfants et de ses beaux parents par sa manière de cuisiner, son comportement vis-à-vis de tout le monde.

La grand-mère dans la famille traditionnelle
Quand elle a dépassé le cap de la vie de mère, la grand–mère est plus libre, mais elle a une place importante dans la tradition, surtout une grand-mère qui a une longue expérience dans le domaine du tissage, la cuisine ancienne, la médecine qui porte son nom, la langue et la littérature orales sous forme de contes, légendes et poésies. Les grands-mères de cette trempe sont très précieuses et très rares maintenant. Elles ont dressé durant leur vie des centaines de métiers à tisser pour faire de grosses couvertures et de beaux burnous en laine ; il s’agit là de chefs d’œuvres faits à la main de bout en bout et que les générations ne connaitrons jamais, parce que plus personne ne pourra les faire à la main aujourd’hui et comme jadis. Ces grands-mères choisissaient les longues nuits d’hiver pour réaliser leurs objets d’art. En hiver, il n’y avait pas d’autres travaux à réaliser ; aussi, elles se mettaient des fois à deux pour laver la laine, la carder, la filer et une fois la quantité de laines obtenues, elles dressaient un métier à tisser pour tisser patiemment, adroitement et faisaient l’effort d’arriver à un meilleur travail. Elles étaient fières quand elles réussissaient à innover dans les formes, les grandeurs, les couleurs pour les couvertures. Une fois le métier à tisser dressé, elle se mettait à l’œuvre en compagnie d’une autre vieille pour discuter à bâtons rompus durant les longues d’hiver de sujets divers sujets, se récitaient des proverbes, déclamaient des poèmes anciens et pérennisés par la mémoire, se racontaient de vieilles histoires toujours intéressantes à entendre et chaque fois pour illustrer leurs sujets de discussion. D’ailleurs les vieilles restaient toujours attachées à la littérature ancienne qu’elles avaient assimilée oralement et au fil du temps grâce à leur mémoire prodigieuse. Elles tenaient aussi à leur cuisine dont la plupart des recettes leur sont venues de leurs aînées. C’est merveilleux les plats apprêtés par grand-mère, avec des ingrédients trouvés dans la nature ou récoltés dans leur jardin, elles arrivaient à réaliser des mélanges aux multiples vertus. Maintenant, leur savoir et leur savoir faire sont tombés dans l’oubli, faute d’avoir été transmis comme cela s’était fait auparavant, lorsque les jeunes étaient en contact permanent avec les vieilles, l’apprentissage se faisait de lui-même, les jeunes avaient la volonté d’acquérir des connaissances, elles avaient compris que c’était leur seul planche de salut et qu’il n’y avait pas d’autre moyen de se valoriser et d’avoir une place honorable lorsqu’elles se marieront. Les jeunes de l’ancien temps était en contact permanent avec les jeunes pour essayer de glaner quelque connaissance supplémentaire dans le domaine des activités traditionnelles et c’est comme ça que l’on arrivait à apprendre tout sur l’ensemble de leurs travaux des champs pour les garçons et les travaux domestiques, artistiques et culturelles pour les filles, compte tenu du fait que les grands- mères de l’ancien temps, tout en travaillant ne perdaient jamais de vue le côté connaissances sur tout ce qui concernait leur quotidien, et tout était prétexte à l’apprentissage. Depuis leur jeune âge, elles avaient entrainé leur mémoire en faisant l’effort de retenir tout ce qu’elles entendaient ; elles saisissaient au vol les histoires qui se racontaient, retenaient ce qui se disait sur les industries manuelles, comme celles concernant la fabrication de la chaux à partir de la transformation de la pierre calcaire, le savon grâce à la transformation des vieilles huiles impropres à la consommation et de la soude tirée de la cendre, le vinaigre obtenu par évaporation du jus de raisin. Ce sont quelques produits fabriqués localement par les femmes et nécessaires à la consommation au quotidien. Ces grands mères arrivaient aussi à mémoriser tout le patrimoine culturel traditionnel comme les contes, légendes, poèmes dont la plupart remonte à la nuit des temps. Et lorsqu’une grand-mère de cette trempe disparaissait, c’était une école qui partait à jamais.

Mais il y avait des grands-mères qui n’avaient rien mémorisé
C’est généralement des vieilles qui, depuis leur vie de mère, ont trimé en allant chaque jour à la source pour faire la navette des cruches d’eau sur le dos, en s’occupant sans relâche des tâches domestiques les plus ingrates. Chaque jour, elles passaient d’un travail à l’autre au point de n’avoir point de temps pour réfléchir, discuter avec les autres femmes de l’actualité. Mais la vie est avant tout une question d’organisation et de bonne gestion du temps. Au fil du temps, il faut apprendre à se faire aider pour s’occuper un peu de soi- même en tant qu’être vivant qui a besoin de repos et de contacts fructueux pour vivre sainement, s’épanouir. Cela dépend surtout du nombre d’enfant qu’on élève à la fois, sans compter les problèmes avec la belle mère, quand celle-ci est méchante, la vie est infernale pour la maman.
Par contre, toujours dans l’ancien temps, il y avait parfois des belles mères raisonnables et qui, quand elles se portaient bien, apportaient une aide appréciable à sa bru pour la soulager et lui permettre de se reposer et de se décontracter, ce qu’il fallait pour avoir un temps pour penser. Une fois devenue belle mère, elles étaient épuisées et ignorantes. Dommage et qu’elles n’avaient rien à transmettre !
Boumediene Abed