Face aux nouvelles mutations énergétiques mondiales, Sonatrach a besoin d’un nouveau management stratégique

Energie

Ayant vécu de l’intérieur, de 1974 à 2015, tant au niveau des structures du ministère de l’Industrie/Energie, qu’au sein de l’importante société internationale Sonatrach avec ses différentes filiales, je tiens à rendre un vibrant hommage à tous les cadres, techniciens, ouvriers et personnel de l’administration pour avoir permis à cette société d’être une firme d’envergure internationale.

Sur le plan comptable, Sonatrach, bien qu’existe une direction l’audit au niveau de la direction générale, établit souvent un bilan consolidé où l’on ne cerne pas correctement les centres de coûts du fait de ce que les économistes appellent les comptes de transfert, pouvant voiler la mauvaise gestion d’une division. Par ailleurs, au niveau des unités de production, la comptabilité établit une valeur globale pour des ventes similaires de certains produits, résultante de la consolidation de produits exportés au prix international et de produits écoulés sur le marché interne à un prix largement plus bas. Aussi, faute de comptes physico-financiers à prix constants, les ratios de gestion sont d’une signification limitée pour apprécier la performance et dans ce cadre évaluer le bilan des contrats toujours en termes de standards internationaux, du partenariat et l’impact de la généralisation des avis d’appel d’offres et des contrats gré à gré prévus par la loi, l’évaluation de la position financière de Sonatrach, ses perspectives et sa structure des coûts d’exploitation, tenant compte des comparaisons internationales. Afin de rendre plus performantes les ressources humaines, par une formation permanente cela implique un audit mettant en relief nettement la typologie du personnel existant, l’adéquation de la formation aux besoins de Sonatrach, la disponibilité des compétences adéquates, les politiques de recrutement, l’évolution de la productivité du travail , les appréciations des mesures d’incitation et enfin l’évaluation du climat et de la culture d’entreprise de Sonatrach (audit social et audit de la culture liés au renouveau du système d’information) dont la prise en compte -au profit des travailleurs- d’une gestion plus rationnelle des importantes sommes des œuvres sociales que consacre annuellement Sonatrach. Aussi, il s’agit de revoir les méthodes de promotion actuelles qui n’ont pas eu les effets positifs sur le terrain, avec la mise en retraite anticipé des cadres ayant atteint l’âge de 60 ans, ce qui est une aberration et a fait fuir de nombreuses compétences hors Sonatrach sans que n’était préparée la relève. Car bien manager les ressources humaines suppose que le planning des actions à mener, doit être synchronisé par un dialogue permanent avec l’ensemble du collectif.
Il s’agit de replacer la stratégie de Sonatrach au sein du nouveau défi de la transition énergétique mondiale dont le défi écologique, devant revoir le modèle de consommation énergétique qui se dessine entre 2023/2025/2030 avec le développement des énergies renouvelables, de l’hydrogène vert et s’orienter vers l’efficacité énergétique (voir audit sous la direction du Pr A. Mebtoul – 8 volumes 980 pages pétrole/gaz de schiste…opportunités et risques, pour une transition énergétique premier ministère Alger – 2015). Sonatrach, société par actions et propriété exclusive de l’Etat, devra évoluer dans un environnement international de plus en plus concurrentiel. Il s’agira impérativement donc d’évaluer l’impact de l’environnement socio-économique et institutionnel. L’on ne peut incomber toute la responsabilité de la gestion aux managers au niveau micro économique de la macro- gouvernance qui sont inextricablement liées, le Conseil national de l’Energie étant l’organe suprême de toute stratégie énergétique. Sonatrach pour pouvoir doubler sa production et cela est possible à l’horizon 2025/2027, plus de 50% du territoire n’étant pas encore exploité, a besoin d’un financement de 70 milliards de dollars pour les cinq prochaines années, sans compter les besoins de financement de Sonelgaz ,qui selon la direction a besoin de près de 200 à 300 milliards de DA par an pour financer ses projets d’investissement et satisfaire la demande croissante en énergie, Sonelgaz, comme Sonatrach ayant un vivier important en ressources humaines pouvant être un pilier pour le développement futur du pays. Il s’agit de revoir la politique des subventions, surtout dans le domaine énergétique non ciblées, source d’injustice sociale, celui qui perçoit 20.000 dinars bénéficiant des mêmes subventions que celui dont le revenu dépasse les 200.000 dinars, la consommation intérieure étant presque au même niveau que les exportations, (50 milliards de mètres cubes de gaz en 2025, selon le PDG de Sonelgaz).
En conclusion, il ne faut pas vendre des rêves : Sonatrach constituera encore pour des années la principale source de devises pour l’Algérie. Les recettes de Sonatrach ont permis des réserves de change estimées, selon le gouverneur de la Banque d’Algérie, fin 2022, à 60 milliards de dollars, pouvant être assimilée à une banque devant favoriser les segments hors hydrocarbures dans le cadre des valeurs internationales. Mais il s’agit d’éviter de se limiter à l’Économique et combattre le cancer du blocage, le terrorisme bureaucratique qui enfante la sphère informelle et la corruption. Le développement durable étant porté forcément par des forces sociales réformistes, qui trouveront des résistances des forces sociales tenants de la rente est tributaire d’une volonté politique de changement par une nouvelle gouvernance et la valorisation du savoir, richesse bien plus importante que toutes les ressources de matières premières et ce au profit exclusif de l’Algérie, acteur stratégique au niveau du bassin méditerranéen et du continent Afrique.

(Suite et fin)
Pr des universités Expert international
en management stratégique
Abderrahmane Mebtoul