Une énième trêve pour permettre l’arrivée de l’aide humanitaire

Soudan

Les annonces de trêves se suivent et se ressemblent. Un cessez-le-feu est entré en vigueur, samedi 10 juin (à partir de 6h, heure de Khartoum) au Soudan, où les habitants ont peu d’espoir de le voir appliqué après de nombreuses trêves violées en bientôt deux mois de conflit qui a conduit à une grave crise humanitaire.Les camps des deux généraux en guerre ont accepté une trêve de 24 heures, avait annoncé vendredi le médiateur saoudien, qui accueille depuis des semaines des négociations entre les belligérants. Trois heures après l’entrée en vigueur de la trêve, des habitants de différents quartiers de la capitale soudanaise ont indiqué à l’AFP qu’ils n’avaient entendu ni bombardements ni affrontements. «Une trêve d’un jour est la moindre des choses à laquelle on aspire. On a hâte d’en finir avec cette foutue guerre», a déclaré à l’AFP Mahmoud Bachir, un habitant du quartier de Bahri. Issam Mohamed Omar, qui habitait dans le centre de Khartoum et a fui à Omdourman, la ville jumelle, veut le départ des paramilitaires. «Pour moi, une trêve qui ne chasse pas les FSR de la maison dont ils m’ont chassé il y a trois semaines ne sert à rien», lâche-t-il, alors que de nombreux habitants ont dénoncé la confiscation de logements par les FSR.
Il s’agit d’un énième cessez-le-feu dans cette guerre déclenchée le 15 avril entre l’armée, dirigée par le général Abdel Fattah al-Burhane, et les paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR) du général Mohamed Hamdane Daglo. Les parties se sont engagées à cesser les violences dans tout le pays pour permettre «l’arrivée de l’aide humanitaire», selon le ministère saoudien des Affaires étrangères. Le commandement général des forces armées a toutefois déclaré qu’il se réservait le «droit de répondre à toute violation que les rebelles pourraient commettre».
Plus de 1 800 morts
«Nous réitérons notre plein engagement en faveur du cessez-le-feu», ont affirmé de leur côté les paramilitaires. Le spécialiste du Soudan Aly Verjee, de l’université de Gothenburg en Suède, ne voit guère comment cette trêve pourrait tenir plus que les autres. «C’est difficile de voir qu’une trêve reposant sur les mêmes critères (qu’avant), surtout d’une si courte durée, aboutira à un résultat sensiblement différent. Cela dit, même une diminution de la violence serait la bienvenue pour ceux qui vivent sous les tirs», dit-il. La guerre a déjà fait plus de 1 800 morts, selon l’organisation ACLED, spécialisée dans la collecte d’informations dans les zones de conflit, ainsi que deux millions de déplacés et réfugiés selon l’ONU. Dans les zones de combat, qui se déroulent principalement dans la capitale Khartoum et la vaste région du Darfour (ouest), les ONG ne cessent d’alerter sur la détérioration de la situation humanitaire.
«À Khartoum, nous estimons que seuls 20% des établissements de santé fonctionnent encore», a déploré, vendredi, le patron du Comité international de la Croix-Rouge (CICR), Alfonso Verdu Perez, lors d’une conférence de presse à Genève.
«Ces dernires semaines, nous avons réussi à livrer du matériel chirurgical à dix hôpitaux» de la capitale, «mais les besoins sont immenses et il reste encore beaucoup à faire», a-t-il ajouté. «Si les parties ne respectent pas le cessez-le-feu de 24 heures, les médiateurs devront envisager d’ajourner les discussions de Jeddah», ont prévenu les médiateurs saoudien et américain qui supervisent des négociations depuis des semaines en Arabie saoudite entre camps rivaux.
APS