Kairouan, depuis les origines

Découvertes

Fondée comme ville par Okba Ibn Nafaâ, Kairouan, dont le nom signifie campement, porte des marques d’une longue histoire.

A l’image de Carthage et Tunis, cette ville arabo-musulmane a vu le jour dans un pays qui a subi de multiples invasions, romaine, vandale, byzantine, avant de garder, des origines à nos jours, un cachet religieux, celui d’un islam qui a rayonné dans tous les continents.
Okba, qui arrivait du Hidjaz, fut probablement attiré par la situation stratégique des lieux qui avaient servi de campement, la qualité du site pouvant donner à Kairouan la vocation de ville garnison, de repli en prévision des soulèvements menaçant d’avoir lieu à une époque où les conflits faisaient partie du quotidien.

Une ville, une référence d’avenir
Cela s’est passé en 670, au lendemain d’un avènement qui allait bouleverser non pas seulement le Moyen-Orient, mais tous les continents. Le flambeau de l’islam a été porté haut et le plus loin possible par des hommes dont la figure de proue a été Okba Ibn Nafaâ. Aussi, à son apogée, l’empire musulman s’attendait des bords du Gange aux Pyrénées. Il connut une grande prospérité. Et, dans ce vaste ensemble, Kairouan apparaît comme le symbole d’un islam devant assurer désormais l’équilibre social et la tolérance. La ville est considérée comme une place privilégiée dans l’imaginaire des populations converties. Les années qui suivirent la fondation de Kairouan furent marquées par l’expansion de l’écriture arabe devant faciliter l’accès au Coran, écrit dans une langue exigeant de chaque apprenant des efforts de concentration et de compréhension.
Puis le développement consista en des relations avec les régions maghrébines et l’Orient, mais sous le cachet du sunnisme. Une ville atypique et chargé d’histoire Kairouan reste marquée à vie par les conquérants qui l’avaient prédestinée à devenir au nord de l’Afrique la capitale des arts et de l’architecture musulmans. Les mosquées en portent les particularités et témoignent d’une valorisation de la ville en tant qu’espace de rencontre entre musulmans venant d’Orient et de l’extrême ouest limité par l’Océan Atlantique. On aurait été plus loin si l’on n’avait pas rencontré l’eau, avaient dit les conquérants.
Revenons à Kairouan pour ajouter qu’on y organisait des cérémonies religieuses au cours desquelles on faisait des offrandes dans une ambiance de chants liturgiques et de prières. Les lieux de culte et les mausolées des saints protecteurs rentrent dans l’histoire d’une ville où la charia islamique et la célébration des mariages se font dans la pure tradition.

Des conditions naturelles et une civilisation florissante
Ces conditions naturelles sont dites favorables à un réel développement. La médina a été bâtie dans un endroit où les nappes phréatiques sont abondantes et où l’eau est d’une qualité qui rappelle celle de Zemzem. Il a fallu aux habitants de découvrir avant de la puiser selon le procédé de la noria actionnée par la rotation d’un chameau. Quand vous allez à Kairouan, avait-on coutume de dire, n’oubliez surtout pas de visiter le mausolée de Sidi Sahli pour ses merveilleux tapis, produits d’un artisanat traditionnel et exclusivement féminin. Les femmes, qui avaient suscité l’admiration de tous par leur esprit inventif, leur patience dans un travail long et difficile, avaient apporté suffisamment de preuves de leur capacité à apporter un plus considérable au développement des villes musulmanes.
Kairouan, terre de civilisation, a vu se forger, avant qu’il n’y ait eu l’invasion destructrice des Béni Hillal, une personnalité berbère et arabo-musulmane. Elle a écrit plus de 1.000 ans d’histoire de l’art, de l’architecture, de la poésie et de l’aménagement des espaces verts pour l’épanouissement de ses habitants. En plus des mosquées et mausolées, la ville a vu de développer des constructions hydrauliques destinées à l’alimentation en eau de la ville ainsi qu’à l’irrigation des terres agricoles, et ce, grâce à un état d’esprit de tolérance, de coexistence et d’une spiritualité favorables à un islamisme du juste équilibre excluant toute forme de préjugés et de violence.
Abed Boumediene