Eviter les utopies du passé

Les enjeux géopolitiques et économiques de la réunion des BRICS du 22 au 24 août 2022 en Afrique du Sud

Le prochain Sommet, le quinzième des BRICS, est prévu du 22 au 24 août 2023 en Afrique du Sud qui exerce la présidence tournante où sera décidé l’élargissement à de nouveaux membres, soit comme membres soit comme observateurs. Selon nos informations, contrairement à certaines supputations des réseaux sociaux, aucune décision n’a été prise. L’on devra éviter du fait des systèmes politiques et économiques différents des cinq pays des BRICS de privilégiera l’idéologie et le politique, ce qui ne pourrait qu’entraîner des divergences, voire une dislocation des Brics mais des critères économiques et sociaux objectifs avec un système de pondération, selon le PIB avec la structure des importations et exportations et les destinations par zones géographiques le PIB par tête d’habitant tenant compte de la pression démographique, le classement de l’Indice du développement humain du Pnud, les réserves de change et le niveau de l’endettement et pour l’ équilibre régional , des candidats par grands continents (voir professeur Abderrahmane Mebtoul 21 juillet 2023 Dakar/Paris Financial Afrik).

Premièrement, c’est sous l’impulsion des BRICS que le G20 a transformé le forum de stabilité financière en conseil de stabilité financière, les BRICS ayant soutenu le rapport sur les G-SIFI pour réduire les risques moraux des institutions financières systématiquement et globalement importants, les fonds de couverture, le shadow banking, les produits dérivés financiers des marchés offshore et les agences de notation ayant été ramenés pour la première fois sous la supervision ; deuxièmement, utiliser leurs devises étrangères afin de réduire le risque d’inflation et de rétrécissement de leur réserve de devises étrangères, et de mieux servir leurs économies réelles;
troisièmement, les bénéfices que la banque de développement pourraient tirer de l’investissement dans les économies réelles et dépasseraient largement ceux que les banques centrales pourraient tirer de l’achat de bons du Trésor des pays développés, et l’investissement dans les infrastructures pourrait stimuler la demande intérieure de ces pays, entraînant la croissance économique; quatrièmement, la Nouvelle Banque de développement ferait la promotion de l’usage des monnaies nationales des pays membres, ce qui pourrait promouvoir le commerce intérieur et l’investissement réciproque de ces pays, réduisant ainsi la dépendance au dollar.
Cinquièmement, au prochain sommet il serait prévu la mise en place d’un mécanisme de paiement durable pour le commerce bilatéral, des pays du BRICS, l’objectif à terme, pas dans l’immédiat étant la création d’une monnaie commune adossé à l’or dont les réserves sont pour la Russie 2327 tonnes, la Chine 2068, l’Inde 795 ; le Brésil 130, et l’Afrique du Sud 125 tonnes. D’une manière générale, l’action des BRICS a permis de soulever des problèmes jusque-là ignorés par les pays développés dans un esprit dépassé de domination, comme le déséquilibre de l’économie mondiale, qu’il ne peut y avoir de développement global sans le développent et de prospérité de la majorité des pays en voie de développement, proposant de créer un partenariat global fondé sur le dialogue productif par une compréhension mutuelle et une coordination des efforts entre le Nord le Sud afin de résoudre les nombreux défis de notre monde.
La valeur d’une monnaie étant fonction de la production et des structure des taux de productivité, l’action de la Nouvelle Banque de développement traduit la volonté des BRICS d’une rénovation de leur gouvernance interne, favoriser le co- développement, se fondant sur le respect du choix du système politique et économique de chaque nation, tenant compte de son histoire et de son anthropologie. Mais il faut être réaliste sur un PIB mondial en 2022 dépassant les 100.000 milliards de dollars, les USA avec près de 25.000 milliards de dollars de PIB en 2022, pour une population d’environ 320 millions d’habitants reste la première puissance économique mondiale. L’Europe vient après la Chine avec un PIB de 19100 milliards de dollars mais pour 1,4 milliard d’habitants) y compris la Grande Bretagne plus de 17.000 milliards de dollars de PIB pour une population inférieure à 600 millions d’habitants. Bien qu’en baisse, le dollar reste dominant dans les transactions internationales suivi de l’euro.
Entre 2021/2022, selon les données du FMI du 28 avril 2023, la part du dollar, dans les paiements mondiaux s’élève à environ à 38 %, l’euro faisant jeu égal avec le dollar ; les avoirs de réserves de change sont d’environ 20 % pour l’euro tandis que celle du dollar américain se situait aux alentours de 60% et la part du dollar dans les réserves de changes mondiales est passée de 71% en 1999, à 58% en 2022, l’euro 20,5%, le yen 5,5%, la livre sterling 5% et le yuan chinois 2,7%. Selon le FMI, sur un PIB nominal mondial qui est passé de 96100 milliards de dollars en 2021 à plus de 100.000 milliards de dollars en 2022 le total di PIB des cinq pays des BRICS est de 27700 milliards de dollars soit 27,7% du PIB mondial en 2022 pour une population de 3,2 milliards d’habitants. Avec les nouvelles adhésions, hypothèse de structure stable en 2022 par rapport à 2021, nous aurons un ratio de 33/34% du PIB mondial pour 50% de la population mondiale, dépassant le G7, environ 30/31%.
Les Brics, accroissent leur part dans le commerce mondial qui a atteint en 2022 32.000 milliards de dollars où la Chine représente 21,5% du commerce mondial, les importations de biens étant de 2688,63 milliards de dollars et les services 441,31, les exportations de biens de 3363,83 et les services 392,19 milliards de dollars , les principaux clients de la Chine pour 2022 étant successivement : les USA avec 16,2%, l’ASEAN avec 15,8% et l’Union européenne avec 15,6%, Mais malgré le poids croissant des BRICS . avec une démographie de 3,2 milliards d’habitants, le groupe ne dispose que de 15% des droits de vote à la Banque mondiale et au Fonds monétaire international.

En conclusion, pour l’Algérie, comme tout autre pays qui voudrait être membre, qui doit tirer les leçons pour l’avenir, il faut analyser avec lucidité les apports de l’adhésion aux BRCIS. Le statut d’observateur est avant tout symbolique et ne confère aucun pouvoir de décision : pour preuve l’Algérie a déposé sa demande d’adhésion (à l’époque au GATT) en juin 1987 est observateur pas d’accord après plusieurs décennies de négociation( la Chine et la Russie étant membre). C’est que la puissance et l’impact dans les relations internationales en ce XXIème siècle se mesurent au poids économique et l’exemple est donné par la Chine qui en quelques décennies représente en 2022 plus de 70% du PIB des BRICS et près de 20% du PIB mondial préfigurant avec l’entrée de nouveaux membres au sein des BRICS entre 2023/2030 avec une profonde reconfiguration du pouvoir économique mondial. Concernant l’adhésion aux BRICS dont le fondement au départ repose sur ses critères strictement économiques, mais ne devant pas oublier les enjeux politiques, il faut un vote unanime des cinq pays, comme au conseil de sécurité, ou l’adhésion à l’OTAN, un seul pays avec un véto pouvant bloquer toute adhésion.

Abderrahmane Mebtoul
Pr des universités
Expert international
(Suite et fin)