« Les diplomates des BRICS regardent parfois les défis qui les attendent et se disent s’ils peuvent y arriver »

Pepe Escobar, analyste géopolitique, à propos de la création d’un Nouvel ordre mondial par les BRICS :

Pepe Escobar, analyste géopolitique et écrivain, a évoqué, dans une tribune publiée sur Sputnik, la création d’un Nouvel ordre mondial par les BRICS affirmant que les diplomates de ce conglomérat «regardent parfois les défis qui les attendent et se disent s’ils peuvent y arriver».

« C’est tellement compliqué, tellement complexe. Si vous les faites interagir de plus en plus étroitement, alors ils pourront relever les défis, mais dans une atmosphère de coopération, de respect mutuel et de respect de la souveraineté de chacun, ce qui est le contraire absolu de l’ordre international fondé sur des règles», a-t-il indiqué.
À la table fatidique de Johannesburg, lors du 15e sommet des BRICS en Afrique du Sud, a observé Pepe Escobar, la Russie a soutenu l’Égypte. La Chine, a-t-il dit, a tout misé sur la magie du Golfe persique : l’Iran, les Émirats arabes unis et les Saoudiens. « Cela va de soi : L’Iran et la Chine sont déjà engagés dans un partenariat stratégique et Riyad accepte déjà de payer l’énergie en yuans », analyse-t-il.
Le Brésil et la Chine, observe-t-il, ont soutenu l’Argentine, le voisin en difficulté du Brésil, qui court le risque de voir son économie entièrement dollarisée, et qui est également un fournisseur clé de matières premières pour Pékin. L’Afrique du Sud a soutenu l’Éthiopie. L’Inde, pour une série de raisons très complexes, n’était pas vraiment à l’aise avec trois membres arabes/musulmans (Arabie saoudite, Émirats arabes unis, Égypte). La Russie a apaisé les craintes de New Delhi. « Tout ce qui précède respecte les principes géographiques et marque l’idée que les BRICS représentent le Sud mondial. Mais cela va bien plus loin, mêlant stratégie astucieuse et realpolitik sans état d’âme », développe Pepe Escobar.
S’agissant des enjeux stratégiques, note cet analyste géopolitique, les BRICS 11 sont désormais en passe de régner sur la route maritime arctique, le corridor international de transport nord-sud (INSTC), les corridors est-ouest de la BRI, le golfe Persique, la mer Rouge et le canal de Suez. Cela, ajoute-t-il, permet de combiner plusieurs corridors terrestres avec plusieurs nœuds des Routes de la soie maritimes. L’intégration est presque totale dans le Heartland et le Rimland. « Tout cela en un seul mouvement stratégique sur l’échiquier géopolitique/géoéconomique », indique-t-il encore.
Bien plus qu’une augmentation du PIB collectif des BRICS 11 à 36% du total mondial (déjà plus important que celui du G7), relève Pepe Escobar,le groupe englobant désormais 47% de la population mondiale, la principale percée géopolitique et géoéconomique est la manière dont les BRICS 11 sont sur le point de littéralement casser la baraque sur les fronts des marchés de l’énergie et des matières premières. « En intégrant l’Iran, l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis, les BRICS 11 s’imposent instantanément comme une puissance pétrolière et gazière », soutient-il. Faisant remarquer que selon InfoTEK, les BRICS 11 contrôlent actuellement 39% des exportations mondiales de pétrole, 45,9% des réserves prouvées et au moins 47,6% de tout le pétrole produit dans le monde.
Avec les BRICS 11 qui pourraient notamment inclure le Venezuela, l’Algérie et le Kazakhstan comme nouveaux membres dès 2024, estime cet analyste géopolitique, ils pourraient contrôler jusqu’à 90% de l’ensemble du pétrole et du gaz échangés à l’échelle mondiale.

Sofiane G.