Des crimes imprescriptibles

Essais nucléaires français au Sahara

Méprisant l’existence des populations locales, les autorités coloniales françaises avaient décidé que le Sahara, en Algérie, était une zone non habitée et donc « bonne » pour ses essais nucléaires. C’est ainsi que la France avait tenté de justifier, à la tribune de l’ONU, le choix du Sahara comme théâtre des essais de sa bombe nucléaire.

Le Conseil national des droits de l’Homme (CNDH) a rappelé ces vérités à l’occasion de la Journée internationale contre les essais nucléaires (29 août). «Toutes les circonstances ayant entouré ces explosions nucléaires et l’ampleur des effets des radiations qui en ont résulté sur la population de la région ne font aucun doute sur le caractère intentionnel et prémédité de ce crime», a martelé le CNDH, soutenant qu’«il s’agit d’un crime imprescriptible qui engage une responsabilité juridique». «Il est plus évident que jamais que le dossier de la mémoire doit continuer à être brandi face à quiconque songerait à l’occulter», a insisté le CNDH, soulignant que «les essais nucléaires, en particulier, demeureront à jamais des crimes imprescriptibles, dont les séquelles ne sauraient être réparées par une quelconque indemnisation, aussi importante soit-elle». Cela étant, «l’espoir subsiste quant à l’atténuation des effets de cette catastrophe, à la faveur d’une recherche approfondie permettant de traiter ce phénomène», a estimé l’organisme consultatif, expliquant qu’«il ne s’agit pas seulement d’octroyer des indemnisations adéquates et d’apporter un soutien psychosocial aux victimes de ces crimes coloniaux odieux, mais aussi d’employer les méthodes scientifiques pour trouver des solutions adaptées aux problèmes environnementaux qui exigent une décontamination totale». Le CNDH a souligné que les explosions réalisées par la France coloniale au Sahara algérien avaient entraîné «la destruction et l’annihilation de l’homme, de la nature et de l’environnement». A ce jour, les séquelles de ces essais constituent un énorme contentieux dans les relations algéro-françaises. Pour rappel, le samedi 13 février 1960, la France effectuait son premier essai atomique, sous le nom de Gerboise bleue, à une cinquantaine de kilomètres de la ville de Hamoudia (Reggane), dans le Sahara algérien, alors sous son occupation coloniale. C’était le premier d’une série d’explosions nucléaires à Reggane, et dans d’autres régions du Sud algérien. Ces essais sont considérés par les Algériens comme des crimes perpétrés par l’armée française à leur égard. La problématique liée à la réhabilitation des deux anciens sites d’essais nucléaires français, à Reggane et In-Ikker, est inévitablement posée à chaque fois que les relations entre l’Algérie et la France soulèvent les questions liées à la Mémoire. A la fin 2022, dans un entretien accordé au quotidien français Le Figaro, le président Abdelmadjid Tebboune a demandé que «la France nettoie les sites de ces essais, vers Reggane et Tamanrasset, où la pollution est énorme», faisant part de son «souhait qu’elle prenne en charge les soins médicaux dont ont besoin les personnes sur place». La question des essais nucléaires a été incluse dans la «Déclaration d’Alger pour un Partenariat renouvelé entre l’Algérie et la France», signée à Alger par le Président Tebboune et son homologue français, Emmanuel Macron, au troisième jour de la visite officielle du président français en Algérie, il y a un an. Les autorités françaises refusent d’ouvrir les archives se rapportant aux populations locales concernées et aux combattants de la lutte de libération qui étaient prisonniers et qui ont été utilisés comme cobayes dans ces expérimentations. Il y a urgence dans ce domaine, au vu de l’impact de ces essais sur l’environnement et surtout sur la santé de la population avec des pathologies jusque-là méconnues dans la région et des cas de cancer ou de malformation chez les nouveau-nés. Les petits-enfants des victimes continuent jusqu’à aujourd’hui encore de souffrir des conséquences de cette situation. Des voix françaises d’experts se sont élevées pour appeler le gouvernement français à collaborer avec les autorités algériennes afin que soient retrouvées les matières radioactives enfouies dans le sud algérien en conséquence des essais nucléaires effectués par la France coloniale. Ils demandent que la France fournisse à l’Algérie «l’aide technique» et «l’apport d’informations sur les zones où elle a enterré les déchets», pour mettre un terme à un problème humanitaire. Mais la France garde toujours secrètes les cartes des endroits où les déchets nucléaires sont ensevelis.é endommagées par la grêler.

Samira Takharboucht