L’Algérie se met à l’abri !

Nouveaux contrats et hausse des prix de vente de son gaz à l’étranger

L’Algérie aura désormais de quoi renflouer ses caisses grâce à la hausse des cours du pétrole et du gaz sur le marché mondial qui traverse la pire crise énergétique depuis 1973, liée directement à la guerre arabo-israélienne. Cette dernière a mené à l’émergence de l’Organisation des pays producteurs de pétrole (Opep) qui a décidé, à l’époque en réaction à la guerre de Kippour, d’augmenter les prix du pétrole et de réduire leur production.
Ce qui a bouleversé l’économie mondiale. Les analystes et même les gouvernements européens qui étaient à l’époque moins dépendants des énergies fossiles ont peur de revivre le même choc pétrolier avec la guerre en Ukraine qui s’installe dans la durée. Cette fois-ci le choc pétrolier pourrait profiter aux pays producteurs, à l’instar de l’Algérie dont plus de 96% de ses recettes proviennent des exportations de pétrole.
Pour s’émanciper du gaz russe qui couvre 45% de leurs besoins, les pays européens cherchent à le remplacer par le gaz algérien, libyen et nigérian. Aucun retour n’a été donné jusqu’à lors par ces pays. Très vigilants. Ils prétendent être dans l’incapacité de fournir plus de gaz au Vieux Continent qui cherche désespérément à s’affranchir du gaz russe. C’est l’excuse avancée par la majeure partie des pays membres de l’Opep, indifférents aux appels récurrents des pays de l’UE d’augmenter leur production pour calmer la hausse des prix du pétrole. Ils ont affiché une unité historique. Ils refusent de mettre en péril leurs intérêts pour sauver ceux des Occidentaux qui discutent d’un sixième paquet de sanctions contre la Russie, visant cette fois l’interdiction des importations du gaz et pétrole russes. Cette décision pourrait avoir des conséquences désastreuses sur l’économie mondiale, a averti, une nouvelle fois, le secrétaire général de l’Opep, Mohamed Barkindo, avant-hier.
Selon lui, un embargo sur le gaz russe ne fera qu’accélérer l’effondrement des indicateurs économiques des pays ultra-dépendants de cette ressource. L’Italie et l’Allemagne en première ligne. L’Italie a réussi à convaincre l’Algérie d’augmenter ses approvisionnements en gaz afin de reconstituer ses réserves de gaz et assurer sa sécurité énergétique. En contrepartie, l’Algérie devrait bénéficier de la flambée des prix de l’énergie dans les pays européens afin d’augmenter les prix de ses livraisons de gaz pour renflouer ses caisses.
Pour l’instant, l’Algérie n’a répondu qu’à l’appel de l’Italie pour combler le vide des importations russes, réaffirmant son engagement à honorer les contrats signés avec ses partenaires. Le pays n’a signé aucun autre accord de fourniture de gaz à d’autres pays membres de l’UE, tentant ainsi de calibrer ses positions en fonction des intérêts et besoins du marché intérieur et de ses politiques de relance économique.
L’Etat concentre ses efforts sur le redressement des finances du pays grâce à la hausse des cours du gaz (430 dollars m3) et du pétrole (plus de 120 dollars le baril). La hausse record de ces matières premières, indispensables, pour les pays industrialisés remplira les coffres du pays et permettra à l’économie de souffler un peu après plusieurs années d’asphyxie financière.
De son côté, la Tunisie pourra tirer profit de la hausse des livraisons de gaz algérien vers l’Italie. Dans une déclaration reprise par plusieurs médias étrangers au mois de février passé, la ministre de l’Industrie, des Mines et de l’Énergie tunisienne, Neila Noura Gongi, a indiqué «la redevance perçue par la Tunisie sur le passage sur son territoire du gaz naturel algérien vers l’Italie va rapporter, d’après les projections de 2022, environ 500 millions de dinars (MDT)». De quoi renflouer les caisses du pays, vides depuis plusieurs mois. Paradoxalement, la guerre en Ukraine profite à plusieurs pays et entreprises, notamment, du secteur énergétique. La crise pétro-gazière risque de se prolonger encore des semaines ou même des mois. Tout comme l’inflation.
La flambée des prix risque aussi de s’accentuer à cause du conflit en Ukraine, mais aussi de la position inchangée des pays membres de l’Opep qui refusent de revoir leur stratégie de production. Pour le cartel et même les experts, la libération prévue de 240 millions de barils par les pays membres de l’AIE ne contribuera pas à résoudre le déséquilibre entre l’offre et la demande. Les prix du pétrole risquent de grimper davantage si les pays de l’Opep+ ne bougent pas. L’inaction des pays producteurs membres de l’Opep en 1973 avait propulsé les prix de plus de 370%.
Samira Takharboucht